Fin 2017, la FFB a confié à Michel Piron, ancien député et ancien président du Conseil national de l'habitat (CNH), la mission de rencontrer les principaux acteurs du monde de la construction et de l'assurance pour établir un diagnostic du système.
À l'issue de ces échanges, un rapport a été rédigé faisant état des constats et des propositions pour adapter le régime.
Il a été présenté lors d'un colloque qui s'est tenu à la FFB, en présence de Julien Denormandie, secrétaire d'État à la Cohésion des territoires, le 21 septembre dernier.
Pour la FFB, les évolutions doivent porter sur deux aspects essentiels :
- les règles applicables au régime décennal?;
- la régulation du marché de l'assurance construction.
Les règles applicables au régime décennal
Proposition 1 : réviser les textes pour clarifier le champ de la responsabilité décennale et des assurances obligatoires
Un régime de responsabilité et d'assurance obligatoire d'une durée ferme de dix ans à compter de la réception ne peut fonctionner correctement sans règles du jeu claires dès le départ. Or, faute de définition de certaines notions, la jurisprudence s'est attachée à pallier ces lacunes, de manière parfois surprenante.
Clarifier le champ de la décennale est devenu incontournable pour gagner en lisibilité, en ce qui concerne tant le champ que le fonctionnement du régime décennal.
Proposition 2 : pénaliser les assureurs dommages ouvrage qui ne jouent pas leur rôle de préfinancement rapide des désordres
Réduire le nombre de déclarations injustifiées ou mal orientées par la mise en place d'une franchise en assurance dommages ouvrage et une révision du ticket modérateur en conséquence.
Le système à double détente - clé de voûte du régime d'assurance construction - est aujourd'hui mis à mal par la multiplication des contentieux et des déclarations injustifiées ou mal orientées. Il convient dès lors de proposer des mesures de nature à rétablir les équilibres.
Proposition 3 : favoriser, par la tarification des compagnies d'assurances, les comportements responsables : mesures de prévention des risques, qualification des entreprises, SAV efficace...
Améliorer la qualité de la construction passe nécessairement par une responsabilisation de l'ensemble des acteurs, y compris les maîtres d'ouvrage, en particulier professionnels.
Ces derniers ne subissent actuellement que très partiellement et indirectement les conséquences des choix faits dans le cadre de la construction (choix des intervenants, contrôle technique...). Aussi la qualité et la prévention doivent-elles être replacées au centre des préoccupations.
La régulation du marché de l'assurance construction
Proposition 4 : garantir un niveau et un contrôle adéquats des provisions
Cela passe par :
- une identification claire des risques souscrits sur la branche construction en France ainsi que des schémas de distribution (courtage/mandats)?;
- l'application des mêmes niveaux de provision dans l'ensemble des pays européens grâce à des règles fixées par l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (EIOPA)?;
- un cantonnement des actifs.
Une assurance décennale gérée en capitalisation suppose des assureurs solides financièrement. Les défaillances de compagnies d'assurances sont en effet de nature à déstabiliser l'ensemble du secteur. Si les règles spécifiques applicables aux compagnies établies en France et les contrôles effectués permettent de considérer que le marché est correctement surveillé, les récentes défaillances d'assureurs intervenues en France en libre prestation de service (LPS) sont l'illustration de lacunes dans le contrôle au niveau européen. Afin d'assurer une saine et sûre concurrence sur le marché de l'assurance construction, les provisions sur le risque construction doivent être mieux contrôlées, quel que soit le pays d'établissement de la compagnie.
Proposition 5 : moduler fortement les contributions au fonds de garantie français, en fonction du niveau comparé des provisions constituées et des risques pris sur la construction en France, tant en dommages ouvrage qu'en responsabilité civile décennale.
Depuis le 1er juillet dernier, le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) est susceptible d'intervenir en cas de défaillance d'un assureur dommages ouvrage, qu'il soit ou non établi en France.
Cette mission est financée par les seuls assureurs dommages ouvrage en fonction de leur niveau de provision.
Or c'est précisément l'insuffisance de provisions de certaines compagnies qui menace la stabilité globale du système. Il importe donc de redéfinir les modalités de financement du FGAO. D'une part, en étendant l'assiette de contribution aux assureurs de responsabilité décennale. D'autre part, étant entendu que la contribution au fonds de garantie tient compte des niveaux de provision au regard des primes, il convient ensuite de l'adapter aux niveaux de primes pratiqués par chaque compagnie au regard des niveaux moyens constatés sur le marché de l'assurance construction. Il s'agit ici d'éviter qu'une sous-estimation des primes entraîne une sous-estimation des provisions.