La Cour de cassation a récemment condamné[1] une entreprise à verser des dommages et intérêts à ses salariés suite à l’application illicite de la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels, ces derniers n’appartenant pas à la liste des professions visées à l’article 5 de l’annexe IV du Code général des impôts.
Pour la Cour, l’employeur qui applique à tort la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels manque à ses obligations dans l’exécution du contrat de travail ayant pour conséquence une incidence négative sur les droits sociaux des salariés et leur causant ainsi un préjudice.
Pour rappel, la déduction forfaitaire spécifique ou plus communément appelée, abattement de 10%, est la technique qui consiste à ajouter au salaire brut toutes les indemnités et remboursements de frais professionnels versés au salarié, puis à abattre le total ainsi obtenu de 10% pour obtenir l’assiette des cotisations sociales (brut abattu).
Mais diverses exceptions à ce principe de réintégration, précisément répertoriées, existent (grands déplacements, part de l’employeur pour l’achat des titres restaurants, prise en charge obligatoire des frais de transport, etc…).
La déduction forfaitaire spécifique ne peut être appliquée que :
-aux ouvriers du Bâtiment et des Travaux Publics non sédentaires, c’est-à-dire travaillant sur chantier et par extension,
-aux chefs de chantier, conducteurs de travaux ou ingénieurs travaillant de façon constante sur chantier.
La consultation et l’accord des salariés est obligatoire.
Pour un dirigeant « salarié » qui est titulaire d’un mandat social, la pratique de l’abattement ne peut se concevoir que si :
-il cumule effectivement un contrat de travail éligible à l’abattement avec son mandat,
-ce cumul est établi, notamment par une reconnaissance explicite de Pôle emploi donnant lieu à cotisations d’assurance chômage au titre du contrat de travail,
-la rémunération du contrat de travail est distincte de celle du mandat.
L’abattement ne peut bien entendu porter que sur la rémunération du contrat de travail.
[1] Cass. soc. 2-6-2021 n°20-12-578 FS-P. M. c/ Sté Air Corsica