Pourtant, cette réflexion reste encore trop fréquemment dictée par des choix idéologiques souvent limités à deux alternatives : climato-sceptiques, heureusement de moins en moins nombreux, ou climato-dogmatiques, malheureusement de plus en plus répandus. Il est urgent de développer une 3ème voie, celle du climato-pragmatisme. C’est celle que nous défendons et qui s’imposera car c’est la seule qui peut obtenir des résultats. Il est temps de laisser tomber les vieilles querelles idéologiques et de passer à l’acte en s’appuyant sur les acteurs clefs que sont les entreprises.
Celles-ci sont prêtes : Depuis plus de 20 ans, la FFB AURA et le réseau des Fédérations les accompagnent dans leurs transitions en partenariat étroit avec les Agences de l’Eau, l’ADEME, la Région et l’Europe. Les entreprises de la filière disposent de l’expertise et des compétences nécessaires pour relever ce défi de l’urgence climatique.
Encore faudrait-il tous s’accorder, Etat, collectivités, pouvoirs publics, maitres d’ouvrage, entreprises, sur une méthode factuelle, pragmatique, concrète qui permette d’obtenir des résultats à la hauteur de l’enjeu et des ambitions affichées.
Cette démarche pragmatique, nous l’appelons de nos vœux sur le plan réglementaire. On assiste aujourd’hui à une surenchère normative qui devient contre-productive. Il ne s’agit absolument pas de nier les enjeux auxquels tentent de répondre ces réglementations, mais l’objectif doit être d’inciter les acteurs à agir ; or aujourd’hui, on constate qu’un certain nombre de règles, au lieu de donner de l’élan, conduisent à l’inverse à asphyxier les initiatives.
Ainsi, en est-il de la réglementation sur la location des logements les plus énergivores dont l’effet pervers est le risque d’un blocage de toute une partie du marché locatif qui creusera un peu plus encore la fracture sociale.
De même, la complexité du dispositif MaPrimeRenov décourage bon nombre de ménages à se lancer dans une rénovation. En Auvergne Rhône-Alpes, le nombre de travaux liés à MaPrimeRenov est en baisse depuis le point haut de la fin d’année 2021 et régresse encore de 12% sur un an au deuxième trimestre 2023. S’il convient de se féliciter du milliard et demi d’euros supplémentaires affectés au dispositif dans le PLF 2024, pourquoi, dès lors, l’accompagner de contraintes supplémentaires qui réduiront notablement son efficacité ? S’agirait-il d’une stratégie privilégiant l’affichage ? On n’ose l’imaginer !
Cette démarche pragmatique est également indispensable pour s’affranchir de postures parfois autant dogmatiques et rassurantes qu’incohérentes et peu efficientes :
Acceptons la mixité de solutions pour adapter la ville au changement climatique : mixité des usages pour maîtriser les mobilités (logements, bureaux, commerces, services) ; mixité des modes constructifs pour rendre la ville plus fonctionnelle et désirable tout en accroissant la sobriété foncière (rénovation, déconstruction/reconstruction, élévation et densification).
Reconsidérons les jardins des maisons individuelles et logements collectifs dans la comptabilité du ZAN : ce ne sont pas des surfaces artificialisées, mais bien des îlots de fraîcheur et de biodiversité qu’il convient de favoriser et de multiplier dans nos villes.
Ne stigmatisons pas non plus la construction neuve : avec la RE 2020, la France est le premier pays à avoir introduit une réglementation qui, aux normes de performance thermique, a rajouté un critère sur l’empreinte carbone. C’est sans doute l’une des réglementations les plus exigeantes, conçue expressément pour maitriser l’impact des constructions neuves sur le climat !
Cette démarche pragmatique apparait in fine incontournable pour réussir la transition climatique du Bâtiment au profit du plus grand nombre. Nous avons une responsabilité collective : nous ne pouvons pas faire une transition de niches, qui plus est, trop chère, dans un monde inflationniste. Agissons ensemble pour une croissance responsable, fondée sur la sobriété, l’innovation, et la viabilité d’un modèle économique pour la filière et ses entreprises.