Au lieu d’adresser la crise de manière sérieuse et efficace, le gouvernement continue de traiter la situation avec désinvolture, à coups d’annonces et de mesures superficielles, dans l’indifférence quasi totale des propositions initiées par la filière dans les multiples instances de concertation depuis la commission Rebsamen jusqu’au Conseil national de la Refondation. Donnons-leur des jeux, disions-nous ?
Dans son discours de politique générale, le nouveau premier ministre Gabriel Attal a évoqué « un choc d’offres pour déverrouiller le logement ». On aimerait sincèrement y croire. Malheureusement les quelques annonces qui ont suivi ne sont pas du tout à la hauteur de l’enjeu :
- Les 20 territoires prochainement désignés pour expérimenter une accélération des procédures, à l’image de ce qui a été fait pour les JO, affichent un objectif de 30 000 nouveaux logements d’ici trois ans ! Toutes les études chiffrent les besoins annuels en centaines de milliers d’unités. On est très loin du compte !
- Pire encore, un certain nombre de mesures vont se révéler totalement contre productives : ainsi, les logements intermédiaires vont-ils être intégrés dans les quotas SRU des communes, avec pour effet immédiat de faciliter l’atteinte des objectifs sans qu’il soit nécessaire de produire plus ! C’est incompréhensible ! Surtout lorsque la Préfète de notre région n’hésite pas à reprendre courageusement la main sur la délivrance des permis de construire lorsque cela est nécessaire. Donnons-leur des jeux, disions-nous ? En l’espèce, cela confine plutôt à une mise à mort dans les arènes !
Bien sûr, nous nous félicitons de la nomination récente du Ministre du logement, nous l’attendions ; mais, là aussi, force est de constater que la feuille de route est encore bien loin d’une politique ambitieuse pour le logement ! Les mesures annoncées d’allégement du DPE et de simplification du dispositif MaPrimeRenov, bien qu’indispensables, ne pourront pas alimenter sérieusement le choc d’offres espéré et soutenir le marché de la rénovation qui s’essouffle. En Auvergne Rhône Alpes, les dossiers MaPrimeRenov engagés à la fin du troisième trimestre 2023 ont baissé de 20% sur un an ! En attendant, toujours rien sur le statut du bailleur privé, ni sur les aides à la primo accession. Donnons-leur des jeux, disions-nous ?
C’est la politique du déni et du renoncement. Mauvais calcul car, le gouvernement prend le risque de perdre le solde fiscal largement positif qu’offre au pays le secteur de la construction et du bâtiment (90 milliards de recettes pour 40 de dépenses) et de compromettre sa politique de l’emploi en ignorant une branche qui accueille près de 9% des actifs dans notre région.
S’il fallait encore des preuves de l’absence de considération pour notre branche d’activité, que dire de la position exprimée par l’Etat pour refuser l’accès de l’activité partielle à nos entreprises ! Les difficultés rencontrées par le secteur du BTP et la crise immobilière relèvent d’un phénomène macro-économique structurel en cours depuis plusieurs mois et appelé à perdurer. Inacceptable !
Donnons-leur des jeux, disions-nous ? La formule peut paraître facile mais elle traduit la colère grandissante de nos artisans et chefs d’entreprise. Elle traduit notre exaspération face à l’absence de détermination des pouvoirs publics de mettre en place des solutions durables à la hauteur des enjeux : Le bâtiment ne manifeste pas, mais forme, emploie, loge, aménage, innove, décarbone.
Et s’il ne s’agissait que de nous ! Mais les contributions du bâtiment aux budgets de la nation et des collectivités se dégradent, le mal logement explose, la rénovation énergétique et la trajectoire bas carbone s’essoufflent, l’emploi s’effrite, la réindustrialisation peine faute de logements…autant de conséquences qui fragilisent désormais toute l’économie et la cohésion sociale de nos territoires.
Nos propositions sont sur la table : retour d’un PTZ élargi, simplification drastique de MaPrimeRenov, création d’un statut pérenne pour les bailleurs privés…. Nous sommes prêts à échanger pour construire une vision de long terme, indispensable et attendue. L’annonce par Bercy d’un prochain Conseil national de la Construction et de la Rénovation offre l’occasion de passer des paroles aux actes. Donnons-leur des jeux, disions-nous ? Ne manquons pas cet ultime rendez-vous !
Samuel Minot, Président de la FFB Auvergne-Rhône-Alpes