Contributeur du "Livre blanc" (Lire par ailleurs), Pascal Royer
(2) estime qu’ « il est urgent d’entretenir les infrastructures et les réseaux », considérant que « l’entretien coûte toujours moins cher que de laisser dépérir le patrimoine ». Au-delà, le dirigeant d’Eiffage Route (Directeur d’établissement dans la région de Lyon) estime que les élus devraient assurer une permanence de la commande publique. Interview.
Pourquoi l’entretien du patrimoine est-t-il une priorité ?
Pascal Royer (P. R.) : Le drame de Mirepoix-sur-Tarn nous rappelle ce qu’il peut advenir lorsqu’un ouvrage d’art vieillit. Une enquête est en cours pour déterminer les causes de cet accident. La vétusté et le défaut d’entretien seront peut-être écartés, mais cet ombre planera. Cela-dit, l’entretien du patrimoine ne se cantonne pas aux ouvrages d’art.
Quels autres ouvrages nécessitent un entretien régulier ?
P. R. : Les chaussées, notamment. Il ne faut pas attendre la formation de nids de poule pour intervenir. Car s’ils sont dangereux, ils attestent aussi d’une atteinte à la structure même de la chaussée. La remise en état n’en sera que plus conséquente… et plus onéreuse. Les canalisations méritent elles-aussi d’être entretenues : à l’heure où l’eau potable devient un bien précieux, il est inadmissible de constater que 25 % des volumes fuient du fait de la porosité des vieilles canalisations.
Et les autres réseaux ?
P. R. : Tous les réseaux sont potentiellement concernés. Il faut raisonner en terme de gestion patrimoniale et qualité de service, c’est-à-dire d’inventaire, de programmation de l’entretien et régularité aussi de son renouvellement.
Qu’attendez-vous des élus qui briguent un nouveau mandat ?
P.R. : Un lissage de la commande publique. Grâce aux travaux de l’Observatoire (2) que j’anime, nous avons constaté un net creux d’activité au début de chacun des deux mandats précédents, surtout le dernier qui a vu la création de la Métropole de Lyon. Nos entreprises ont alors dû prendre des mesures d’activité partielle, ce que notre secteur n’avait jamais connu. Une chute de 30 %, c’est violent ! Et quand l’activité a enfin repris, nous avons eu beaucoup de difficulté à retrouver les capacités de production nécessaires, au niveau des effectifs notamment.
Comment parvenir à cette linéarité ?
P. R. : Les élus doivent intégrer que leurs projets mettent de plus en plus de temps à se concrétiser. Il devient donc pertinent compte tenu des temps d’études et de concertation et donc de raisonner sur deux mandats pour être sûrs de les voir aboutir. Il leur faut changer de modèle et agir de telle sorte qu’ils aient toujours des opérations "à pousser". Ils seront gagnants, et nous, en obtenant une meilleure lisibilité, nous pourrons mieux gérer nos équipes. Notre activité doit regagner en linéarité.
Avez-vous des craintes pour le début du prochain mandat ?
P. R. : Nous alertons les futurs élus pour qu’ils assurent une permanence de la commande publique. Nous espérons être entendus. Pour éviter le creux du début de mandat, nous leur demandons de donner suite aux projets prêts à être lancés et de passer des marchés pour l’entretien du patrimoine. Ainsi, nous conserverons toutes nos capacités productives pour réaliser leurs futurs projets.
(1) BTP Rhône et Métropole a mis en place un Observatoire de la commande publique voici une bonne dizaine d’années pour analyser les évolutions des marchés contractés par les principaux maîtres d’ouvrage publics du département du Rhône
(2) Pascal Royer est membre du bureau de BTP Rhône et Métropole La filière construction, force de proposition via son "Livre blanc"
BTP Rhône et Métropole a fédéré une trentaine d’acteurs de la filière construction autour d’un projet : produire un document qui, faisant la somme de leurs propositions pour la cité de demain, est diffusé cet automne auprès des candidats du scrutin de mars 2020.
En savoir plus : http://www.btprhoneetmetropole.fr/tft/LBEM19_ok.pdf