Recouvrer des créances en Europe

En cas de litige transfrontalier, des procédures européennes simples existent afin de permettre aux entreprises le recouvrement de leurs créances transfrontalières : l’injonction de payer européenne et le règlement des petits litiges. Le recours à un avocat n’est pas obligatoire.
14:1903/03/2023
Rédigé par FFB Nationale

 

L’injonction de payer européenne

 

L’injonction de payer européenne1 est applicable dans les États membres de l’Union européenne (à l’exception du Danemark) à titre facultatif. Les justiciables peuvent donc utiliser cette procédure ou celle qui existe dans leur droit national. Elle porte sur les créances pécuniaires, civiles ou commerciales, liquides et exigibles qui résultent d’un contrat, d’un accord entre les parties, ou d’une reconnaissance de dettes et ce, quel que soit le montant concerné.

 

La procédure s’applique aux litiges transfrontaliers, c’est-à-dire dans lesquels au moins une des parties a son domicile, sa résidence habituelle ou son siège social dans un État membre autre que l'État membre de la juridiction saisie.

 

En principe, le tribunal compétent est le tribunal du lieu de résidence du défendeur (domicile ou siège social), notamment lorsque celui-ci est un consommateur. Dans certains cas, la compétence territoriale peut varier2 : lieu d’exécution du contrat, de livraison, etc. Le formulaire-type obligatoire pour présenter la demande liste les hypothèses correspondant aux cas particuliers.

 

 

Procédure

 

Toute demande est adressée à la juridiction concernée au moyen d’un formulaire type (Formulaire A), accompagné des pièces justificatives. Le formulaire doit être rempli dans la langue acceptée par l’État membre destinataire du dossier, et selon les modalités de transmission en vigueur, indiquées dans le formulaire et sa notice.

 

La juridiction doit statuer sous 30 jours, c’est-à-dire délivrer l’ordonnance, rejeter la demande, l’accueillir partiellement ou demander un complément de pièces. Dans ce dernier cas, en l’absence de réponse du demandeur, la demande est rejetée.

 

Le demandeur notifie la décision à chacun des défendeurs, en l’accompagnant du formulaire d’opposition. La notification précise les modalités d’opposition (délai de 30 jours, juridiction compétente, etc.) à l’injonction de payer. Elle indique également les conséquences du défaut d’opposition, ainsi que la possibilité de réexamen de la demande.

 

Une copie de l’acte de signification doit être adressée au tribunal en cas de contestation du défendeur, le litige sera réglé en vertu du droit national après transfert à la juridiction compétente.

 

En l’absence d’opposition du défendeur, l’injonction devient immédiatement exécutoire. Une copie de l'injonction, accompagnée le cas échéant d'une traduction, est envoyée aux autorités compétentes dans l'État membre où doit avoir lieu l'exécution. Cette dernière se déroule conformément aux règles et procédures nationales en vigueur localement, sans procédure de validation (exéquatur). Le demandeur demande à l’État qui a rendu la décision, un certificat attestant que la décision est exécutoire.

 

Il est possible, pour le défendeur, de demander le réexamen de l'injonction de payer européenne devant la juridiction qui a rendu l'injonction à l'expiration du délai de 30 jours dans trois cas uniquement :

  • quand la signification ou la notification a été effectuée dans des conditions ne permettant pas d’être sûr que le défendeur a réellement été destinataire de la signification de l’injonction ;
  • quand le défendeur a été empêché de contester la créance pour cause de force majeure, ou circonstances extraordinaires ;
  • lorsque l’injonction de payer a été manifestement délivrée à tort ou en raison de circonstances exceptionnelles.

 

 

1 Règlement CE 1896/2006 du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d'injonction de payer, modifié par le règlement CE 2015/2421 du 16 décembre 2015, applicable depuis le 14 juillet 2017.

2 Selon le règlement UE 1215/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit « Bruxelles I bis » (voir fiche « Contrats privés »).

 

 

 

Règlement des litiges n’excédant pas 5 000 €

 

La procédure européenne de règlement des petits litiges3 permet le recouvrement de créances civiles ou commerciales transfrontalières entre États membres (à l’exception du Danemark) jusqu’à 5 000 € en principal. Elle existe parallèlement aux procédures nationales.

 

Une décision rendue dans le cadre de la procédure européenne de règlement des petits litiges est reconnue et exécutable dans un autre État membre sans exequatur (procédure constatant la force exécutoire d'une décision prise dans un autre État membre) et sans qu'il soit possible de s'opposer à sa reconnaissance.

 

La procédure est similaire à l’injonction de payer européenne. Ainsi, le demandeur remplit le formulaire type (Formulaire A) et l’envoie à la juridiction concernée (juridictions de proximité ou tribunal de commerce). Il peut le transmettre par voie électronique si le pays concerné accepte une telle démarche.

 

La juridiction peut demander des compléments de pièces et accorder un délai au demandeur pour ce faire. Elle peut aussi décider la tenue d’une audience contradictoire si elle l’estime nécessaire.

 

Ensuite, la juridiction envoie un formulaire de réponse, accompagné d’une copie du formulaire de demande, au défendeur qui a 30 jours pour répondre. Toute réponse du défendeur doit être transférée par la juridiction au demandeur dans un délai de 14 jours.

 

La juridiction rend sa décision dans les 30 jours suivant :

  • la réception de la réponse du défendeur ;
  • la réception des pièces complémentaires qu’elle aura demandées ;
  • ou l’audience à laquelle les parties auront été convoquées.

 

Lorsque la décision est notifiée aux parties, le demandeur obtient, de la part de l’État qui a rendu la décision, un certificat attestant que celle-ci est exécutoire. Les règles d’exécution ainsi que les voies de recours sont déterminées par le droit national applicable aux parties et le recours éventuel n’est pas suspensif.

 

Comme pour l’injonction de payer européenne, quelques cas exceptionnels permettent le réexamen de la décision, notamment lorsqu’il y a un doute sur la régularité de la signification auprès du débiteur, ou si ce dernier démontre qu’il n’a pas pu contester la demande en raison d’un cas de force majeure.

 

 

L’ordonnance de saisie conservatoire

 

Depuis janvier 20174, un créancier peut, pour faciliter le recouvrement de sa créance, obtenir une ordonnance de saisie conservatoire afin de bloquer des fonds détenus par son débiteur sur un compte bancaire situé dans un autre État membre (hors Danemark).

 

Cette ordonnance est demandée, à l’aide d’un formulaire officiel, auprès de la juridiction compétente désignée dans le contrat litigieux ou par celle de l’État où l’obligation a été exécutée. Pour que la demande soit jugée recevable, elle doit remplir certaines conditions :

  • la créance doit être certaine au vu des éléments qu’il joint à sa demande ;
  • l’urgence doit être caractérisée (péril, risque de recouvrement difficile ou impossible) ;
  • le créancier n’a pas encore obtenu de décision au fond ou une transaction, à l’encontre du débiteur.

 

L’ordonnance de saisie exécution est alors délivrée sans audience contradictoire, mais le débiteur dispose de voies de recours contre cette décision dès qu’il est informé du blocage de ses comptes.

 

Pour plus d’informations, voir le portail E-justice Europa pour ces 3 procédures.

 

 

3 Règlement CE 861/2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges.

4 Règlement UE 655/2014 portant création d’une procédure d’ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires.

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