FRANCK COTTON EN BREF
Âgé de 56 ans, Franck Cotton est gérant de Cotton Frères, une entreprise familiale de maçonnerie établie à Pont-du-Château (Puy-de-Dôme). Il est par ailleurs président du Conseil des professions et des affaires techniques de la FFB, président de la FFB Auvergne, vice-président de la FFB et président du BNTEC.
En 2015, le BNTEC 1, créé par la FFB en 1990 pour permettre aux métiers du bâtiment d'animer des commissions de normalisation de leur secteur, a fêté son 25e anniversaire. C'est l'occasion de revenir sur le sujet de la norme, qui n'en finit pas de susciter des débats. Pour situer mon propos, je rappellerai que c'est à la suite de l'effondrement d'un mur de soutènement en 1958 que la profession a pris conscience qu'il fallait harmoniser ses pratiques, et que le premier DTU a vu le jour sous l'égide du CSTB. Les DTU sont devenus des NF DTU, normes homologuées par l'Afnor, à partir de 1990. Engagés dans les commissions de normalisation du BNTEC ou de l'Afnor, les professionnels membres des Unions et Syndicats de la FFB ont formalisé les règles de l'art du bâtiment et veillé à préserver les savoir-faire métier dans l'élaboration de toutes sortes d'autres normes (normes produits de construction, Eurocodes…), en recherchant toujours le consensus avec l'ensemble des autres catégories d'intérêts (maîtres d'ouvrage, maîtres d'oeuvre, experts techniques, contrôleurs, fabricants…). D'application volontaire — au contraire de la réglementation, qui s'impose —, les normes d'exécution que sont les NF DTU représentent une avancée considérable, car elles sont un contrat type qui protège aussi bien l'entreprise que son client, et elles permettent un échange sur des bases objectives entre toutes les parties concernées d'un projet. Avec un patrimoine de 800 normes, dont la maintenance est effectuée par les métiers et leurs partenaires, les quelque 90 commissions constituées sous l'égide du BNTEC peuvent donc être fières de leur travail. Cependant, les normes vivent et subissent les évolutions du monde qui nous entoure. Nous constatons aujourd'hui qu'une grande partie d'entre elles se négocient au niveau européen, où un très grand nombre de produits et de systèmes nouveaux entrent dans le processus de normalisation à l'initiative des fabricants 2. Ce fait doit nous inciter à la vigilance, car très peu d'entrepreneurs issus de petites ou de moyennes entreprises participent à ces commissions européennes. Le motif est souvent banal et bien compréhensible : manque de disponibilité, difficultés à maîtriser l'anglais et sans doute renoncement à faire valoir une approche métier locale dans des instances mélangeant les pratiques de tous les pays sans bénéfice concret. Mais tout le risque est là, car c'est sans expérience que nos entreprises seront amenées à mettre en oeuvre ces nouveaux produits — et elles y seront tenues à cause du lien de plus en plus étroit de ces normes avec les multiples réglementations européennes. Nos entrepreneurs seront ainsi et sont déjà exposés à un risque accru de sinistralité et de dépossession de leur maîtrise technique au bénéfice d'un processus industriel qui les transforme en simple « poseurs ». Cette tendance, confirmée par des projets d'harmonisation européenne des normes d'exécution — nos NF DTU —, montre bien qu'il ne faut pas se tromper de débat et que nos organisations doivent accroître leur engagement jusque dans la normalisation européenne. C'est à cette condition qu'elles pourront continuer à maîtriser l'évolution technique des métiers du bâtiment et ses prolongements en matière de formation et de qualification. C'est aussi à cette condition que nous pourrons continuer à faire du bâtiment une activité économique bénéfique pour l'ensemble de la société, exemplaire par les valeurs humaines qu'elle perpétue, unique par son rôle d'ascenseur social.
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Bureau de normalisation des techniques et équipements de la construction du bâtiment, par délégation de l'Afnor.