Passer de salarié à repreneur de l'entreprise qui vous emploie, le parcours n'est pas si fréquent. Surtout quand on n'a aucun lien familial avec l'ancien propriétaire et que l'on était âgé d'à peine 27 ans au moment du rachat. C'est pourtant ce qu'a réalisé Mathieu Bielokopytoff, associé-gérant depuis 2011 de la société de dallage industriel ETBL-TSI, située à Saint-André-de-Corcy, une petite commune de l'Ain à mi-chemin entre Lyon et Bourg-en-Bresse. En compagnie de Laurent Maisonneuve, qui avait pour sa part une quinzaine d'années d'ancienneté dans l'entreprise au moment de la reprise, Mathieu Bielokopytoff gère une société réalisant entre 4 et 6 millions d'euros de chiffre d'affaires selon les années, et employant une dizaine de personnes.
Fils d'un père économiste de la construction et chargé d'affaires dans une entreprise de maçonnerie, et d'une mère secrétaire comptable et chargée d'affaires dans une société de plomberie, Mathieu Bielokopytoff baigne depuis son enfance dans le monde du bâtiment, ce qui l'a conduit à emprunter la même voie que ses parents. Titulaire d'un BTS en Économie de la construction, le futur entrepreneur se forme deux ans durant sur le terrain, comme conducteur de travaux et chargé d'affaires dans une entreprise de maçonnerie et charpente. Puis il travaille pendant quelques mois comme chargé de programmation pour le projet de rénovation de l'hôpital de Bourg-en-Bresse. Enfin, il intègre ETBL-TSI en 2009 comme chargé d'études et chargé d'affaires.
Deux ans plus tard, lui et son actuel associé saisissent l'opportunité de racheter l'entreprise à leurs propriétaires désireux de passer la main. Les repreneurs sont complémentaires puisque Mathieu Bielokopytoff s'occupe de la gestion commerciale et technique des projets, tandis que Laurent Maisonneuve pilote les achats et la conduite des travaux. Mais les cédants leur ont aussi correctement préparé le terrain : « Tout en nous accompagnant pendant la phase de transition, ils nous ont confié peu à peu les rênes de l'entreprise, se souvient Mathieu Bielokopytoff. Du coup, le changement programmé de la direction devenait transparent aux yeux de tous - de la clientèle en premier lieu. » Ce qui a notamment rassuré les banques, « qui ne nous ont causé aucune difficulté pour nous accompagner sur ce projet grâce à l'implication du vendeur ». « Dans ces conditions, poursuit le jeune entrepreneur, nous avons réussi à préserver l'ADN de l'entreprise, qui repose sur la qualité du travail réalisé, la réactivité et la proximité avec le client », grâce notamment à la présence d'un conducteur de travaux tous les jours sur le chantier. ETBL-TSI n'entend pas pour l'heure s'éloigner de sa zone de chalandise, sauf exception, ni se diversifier en dehors du dallage industriel. Pourquoi cette prudence ? « Tant que nous n'avons pas fini de rembourser les banques, nous nous concentrons sur des développements internes, comme l'achat de nouveaux dépôts ou la construction de nouveaux bureaux, explique Mathieu Bielokopytoff. Mais par la suite, nous explorerons sûrement d'autres pistes. »
À plus court terme, le dirigeant sait qu'il doit se préparer à deux révolutions techniques. D'une part, la norme NF DTU 13.3, définissant les règles de conception, de calcul et d'exécution des travaux de dallage en béton à usage industriel ou assimilé, qui va bientôt entrer en révision. D'autre part, le BIM : « Tôt ou tard, un client nous demandera de travailler en mode BIM, en partageant avec les autres corps de métier les informations sous la forme d'une maquette numérique 3D. Le jour venu, nous devrons être prêts. »Aimant s'impliquer dans les dossiers touchant à la profession, Mathieu Bielokopytoff est administrateur de la FFB pour le département de l'Ain et pour la région Auvergne-Rhône-Alpes, ainsi que vice-président et chargé des affaires économiques à l'Union nationale des entrepreneurs de sols industriels (UNESI-FFB). « Rencontrer des confrères et dialoguer avec d'autres corps de métier permet de s'ouvrir de nouveaux horizons », assure-t-il.