Il y aura du nouveau lors des finales internationales des Olympiades des Métiers 2017, qui se dérouleront à Abou Dhabi (Émirats arabes unis) en septembre prochain : pour la première fois, elles accueilleront une épreuve de construction en béton armé à laquelle participera une équipe française. Tout a commencé à l'occasion des dernières finales internationales de l'épreuve, en 2015 à São Paulo, au Brésil. En visite sur place, une délégation de la FFB assiste alors à la finale de l'épreuve de construction en béton armé, pour la première fois en démonstration, et constate avec dépit qu'aucune équipe française n'est en lice, alors que notre pays dispose dans ce métier - qui pèse à lui seul un tiers de l'activité du bâtiment - d'entreprises dont le savoir-faire est reconnu à l'échelle internationale.
La décision est prise : en cas d'intégration de cette épreuve à part entière en 2017 - ce qui a été confirmé depuis par l'organisateur WorldSkills International -, la France sera de la partie.
Chargée en octobre 2015 de mettre sur pied cette nouvelle épreuve en France, avec le Comité français des Olympiades des Métiers (Cofom), l'UMGO-FFB s'est engagée dans un véritable « contre la montre » pour pouvoir l'inclure en temps et en heure dans le calendrier de la manifestation, tout en respectant le cahier des charges de l'organisateur. Comme leur nom le suggère, les Olympiades des Métiers sont à ces derniers ce que les Jeux olympiques sont au sport. Dans le cadre de cette vaste épreuve internationale, dont ce sera la 44e édition en 2017, quelque 700 jeunes se mesurent tous les deux ans dans près de cinquante métiers de différents secteurs, du bâtiment aux métiers de bouche, de l'automobile aux nouvelles technologies... À l'issue des sélections régionales, des finales nationales permettent de désigner les lauréats de chaque pays qui auront l'honneur de se retrouver pour la grande finale internationale.
CRÉATION D'UNE NOUVELLE ÉPREUVE
La première étape a consisté à désigner un expert métier, Frédéric Miquet, qui s'est entouré d'une équipe de professionnels pour définir le contenu de l'épreuve, conçue pour des candidats en binômes. Dirigeant de l'entreprise de maçonnerie et gros œuvre ESBTP, qui emploie une quarantaine de salariés à Changé (Sarthe), ce Compagnon du Devoir formé par la méthode du tour de France n'en était pas à son coup d'essai, puisqu'il fut l'entraîneur du représentant français à l'épreuve de maçonnerie des Olympiades des Métiers 1995, qui avait obtenu la médaille d'or. Un an plus tard, la mission était accomplie : « La plus grande difficulté a été de concevoir une épreuve conforme aux standards du Cofom, qui se prête à un système de comptage des points unique pour toutes les épreuves et qui corresponde au niveau requis, comportant des exigences techniques à la fois élevées et réalisables dans le temps imparti », commente Frédéric Miquet.
Conformément au cahier des charges de WorldSkills International, l'épreuve doit comporter un premier module correspondant à un élément en béton décoratif. Sa déclinaison dans l'épreuve française a pris la forme d'un banc, dessiné par la designer stéphanoise Joëlle Vila. Pour le réaliser, les candidats ont dû créer le coffrage, puis procéder au ferraillage et au coulage de l'objet, en utilisant le mortier spécial à très hautes performances, destiné à la réalisation d'éléments non structurels, de moulages et d'éléments décoratifs. Très fluide et de couleur blanc cassé, ce mortier a été choisi notamment pour sa montée en résistance rapide, qui a permis un décoffrage dès le deuxième jour (à 1 jour la résistance est de 60 Mpa, et la résistance à la flexion, de 6 Mpa). Quant au second module, il a consisté à concevoir et mettre en œuvre un coffrage de mur en angle, en y intégrant des mannequins de réservation (porte et fenêtre) et la conception de joints en creux, en s'arrêtant juste avant le coulage qui aurait exigé des moyens techniques sortant du cadre de l'épreuve. Le coffrage a été réalisé en utilisant le système manuportable pouvant être mis en œuvre sans grue.
TIRER LE MÉTIER VERS LE HAUT
Pour Frédéric Miquet, cette nouvelle épreuve est un excellent levier pour élever le niveau de compétences dans les métiers du béton armé, depuis les centres de formation et par ricochet dans les entreprises. « À titre d'exemple, le dosage du mortier est d'une extrême précision, puisqu'il exige 2,75 litres d'eau pour un sac de 25 kg de poudre, précise-t-il. Cela met en évidence l'importance de respecter les règles de l'art pour obtenir un ouvrage de qualité. »
Cette nouvelle présence aux Olympiades des Métiers est aussi une formidable vitrine pour les métiers de la construction en béton armé : la réalisation du coffrage de mur en angle met en évidence et porte à la connaissance du public toutes les compétences requises et toute la technicité qui est mise en œuvre quotidiennement sur les chantiers. Pour l'expert métier, les Olympiades des Métiers correspondent à un esprit qui n'est pas fait seulement de compétition, mais aussi de partage, d'entraide et de respect des concurrents, proche de la philosophie du baron de Coubertin, et qui n'est pas sans rapport avec l'esprit d'équipe qui doit animer les compagnons sur le chantier.
Un message qui est bien passé auprès des concurrents et du jury : les finales nationales, qui se sont déroulées sans encombres du 9 au 11 mars dernier à Bordeaux, ont permis de désigner le podium : la troisième place revient à la région Nouvelle-Aquitaine, la seconde à la région Grand-Est, tandis que les lauréats sont Kévin Devos et Joris Sampayo de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Ils ont maintenant quelques mois pour s'entraîner, sous la houlette de Frédéric Miquet, sur les plans technique, physique et mental, pour porter haut les couleurs françaises lors des finales internationales de septembre à Abou Dhabi.