À Piau-Engaly, à 1 870 m d'altitude, au cœur des Hautes-Pyrénées, un projet de réhabilitation d'une friche immobilière fait aujourd'hui référence en matière de développement économique du territoire tout autant que pour les procédés de construction efficaces et innovants qui ont été mobilisés : de la façade aux chambres, en passant par les équipements, tout a été pensé pour répondre aux contraintes de temps, d'altitude, de conditions de travail et, bien sûr, aux contraintes financières !
À l'origine du projet, un désir fort de redonner du souffle aux stations de ski des Pyrénées et de dynamiser les territoires associés. Pour ce faire, Antoine Nunès, patron de la PME Gallego, une entreprise générale ancrée localement, décide de racheter, avec Étienne Catelan, directeur d'exploitation de Gallego, et Raymond Campo, président de Socabat (société Campo immobilier), un ancien bâtiment appartenant au comité d'entreprise d'Astrium. Laissé à l'abandon depuis 2005, ce bâtiment était dédié au seul accueil de séjours de ski. Antoine Nunès et ses associés font le choix de transformer ces lits « froids » en lits « chauds » disponibles toute l'année sous la forme d'une auberge de jeunesse qui peut accueillir les classes de neige, les groupes et les particuliers, été comme hiver, pour de courts et moyens séjours en montagne, à destination des publics français et espagnol. La collaboration de l'organisme de promotion des domaines skiables pyrénéens, N'Py, dans l'exploitation du site, permet de lancer l'opération définitive.
Un chantier sous contraintes
Le site présentait de grosses contraintes techniques : localisé en haute montagne sur un site Natura 2000, le chantier - démolition comprise - devait s'accomplir entre la fonte des neiges (vers avril-mai) et la saison froide (début novembre 2018). La réhabilitation devait prévoir l'étanchéité complète des parois chaudes, ainsi que des équipements techniques non visibles à mettre en place sur un immeuble datant de 1970 et déjà compartimenté en appartements de 4 à 6 personnes avec salles de bains individuelles. Au préalable, il fallait donc déconstruire la façade, en menuiserie assez légère, et préparer l'intérieur en retirant notamment l'amiante présent dans les colles des faïences, les sols et les conduites verticales. Ces différentes contraintes ont incité à industrialiser au maximum l'ensemble via l'utilisation de préfabriqués pour les façades, mais aussi pour l'intérieur. Cette option a permis de restreindre les déplacements de véhicules et de matériels, de limiter le travail des ouvriers en milieu difficile, de réduire la production de déchets sur place et de mener la phase de construction en parallèle de la démolition. Un gain de temps considérable !
Détails des panneaux
de la façade-toiture
- Dimensions : 10 m de long, 2 m de large
- Panneaux OSB 3 - 12 mm - M1
- Chevrons bois massif traités en préventif
- Isolation laine de verre
épaisseur 240 mm - R = 7,50 m².K/W
- Panneau OSB 3 RL - 18 mm
- Étanchéité climat de montagne, y compris chanlatte
- Panne support couverture traité classe IV
- Couverture bac acier simple peau
épaisseur 0,75 mm
- Chéneau métal et bavette de finition
- Insertion des Velux pour les chambres
Façade : panneaux, isolation et bardage posés en une seule opération
« Pour les façades, nous avons choisi de limiter au maximum le travail sur place, explique Jérôme Escrieut, directeur des études chez Gallego. Nous avons donc conçu et fait fabriquer en atelier des panneaux de bois de 10 m de long sur 2 m de large. Ces panneaux étaient isolés, étanchés et bardés en atelier, et équipés de leurs châssis vitrés pour les chambres. Un travail beaucoup plus sûr et confortable que sur une façade avec une pente à 100 %. Toute la structure de la façade a ainsi été posée en une seule opération. »
Aménagement intérieur : des cabines préfabriquées innovantes
Le projet Skylodge a aussi innové en matière d'aménagement intérieur. En collaboration avec le cabinet VO Architectes, ont ainsi été préparées en plaine des cabines de couchage préfabriquées en bois, incluant murs, lits, armoires, électricité, sols, peintures... Les cabines ont ensuite été transportées sur le site et glissées dans le bâtiment. Il a suffi de les brancher sur les boîtiers électriques et les gaines de soufflage d'air tempéré. Un concept totalement innovant qui a généré gain de temps et économies d'échelle, permettant de respecter l'objectif d'offrir des chambres à partir de 15 euros la nuit ! « Le concept a fait ses preuves, tant du point de vue de la construction que de l'accueil des clients. Il est certain que nous le renouvellerons dès que nous aurons un chantier qui le permettra », précise Jérôme Escrieut.
Une gestion moderne, un succès commercial
En plus de méthodes de construction innovantes, le projet Skylodge s'appuie sur une gestion moderne grâce à un système de paiement et de réservation connecté mis en place par une start-up toulousaine. L'accueil se fait à toute heure via des bornes automatiques. Une carte-clé de la chambre sert à payer toutes les dépenses sur place (chambres, boissons, repas, etc.) et à accéder à l'ensemble des espaces et services du bâtiment (casier à skis, placards, etc.). Le chantier, qui a débuté au printemps 2018, s'est achevé à temps pour recevoir les premiers clients dès décembre 2018. Après un an d'exploitation, le bilan est très positif : 2019 a dépassé les objectifs et l'année 2020 est déjà bien remplie en termes de réservations. Au niveau local, ce projet apporte à la station de Piau-Engaly plus de 20 000 forfaits de ski supplémentaires, soit environ 730 000 euros de recettes complémentaires pour les seuls mois d'hiver. L'idée va donc être dupliquée sur d'autres stations des Pyrénées. « Cerise sur le gâteau, ce chantier a aussi été l'occasion de belles rencontres humaines. L'ensemble des travailleurs était logé dans un même hôtel et l'ambiance y a été excellente. Tout le monde a œuvré pour finir dans les temps. Un projet collectif humain, et pas seulement commercial », conclut Jérôme Escrieut. L'entreprise Gallego s'est totalement investie dans ce projet et ce, à toutes les phases de l'opération : la conception avec le cabinet VO Architectes, l'exécution TCE avec des entreprises locales.
Jérôme Escrieut, directeur des études chez Gallego
« Le concept a fait ses preuves, tant du point de vue de la construction que de l’accueil des clients. Il est certain que nous le renouvellerons dès que nous aurons un chantier qui le permettra. »
Le chantier en bref
- Maîtres d'ouvrage : Caisse des dépôts et consignations, N'Py (Lourdes), Antoine Nunès / Étienne Catelan / J. Sanchez, directeur du bureau d'études Setes
- Maîtres d'œuvre : VO Architectes (Paris), Setes (Tarbes), Socotec (Tarbes)
- Entreprise générale : Gallego (conception, montage juridique et financier, exécution TCE)
Chiffres clés
- Montant des travaux : 3 400 000 euros HT
- Durée d'exécution : 5 mois
- Gros œuvre et démolition : 10 200 heures de travail
- Corps d'état : 15 500 heures
- 2 900 m² de planchers
- 290 lits à l'année - 2 restaurants
- Livraison : 19 décembre 2018
- Taux de fréquence des accidents du travail : 0