Rendre à la façade de cet immeuble thionvillois centenaire tout son éclat et faire à nouveau rayonner la pierre de Jaumont dont elle est faite : telle est la tâche qui a été confiée à Romain Giaroli, dirigeant de l'entreprise de ravalement Giaroli Denis, active depuis cinq générations à Thionville (Moselle), où elle emploie une dizaine de salariés. « La pierre de Jaumont est extraite dans des carrières situées au-dessus de mines de fer à proximité de Metz, explique-t-il. C'est précisément la présence d'oxyde de fer qui lui donne cette couleur jaune ocre si caractéristique. » Utilisée pour la construction d'édifices marquants comme la cathédrale Saint-Étienne, le palais du Gouverneur ou l'Opéra-théâtre de Metz Métropole, ainsi que pour de nombreuses constructions privées, cette pierre calcaire demi-tendre, relativement facile à travailler, est l'un des symboles du pays mosellan.
Elle est aussi très sensible à la pollution atmosphérique, liée entre autres à la circulation, qui a tendance à la faire noircir, d'où la nécessité d'effectuer un ravalement de façade à intervalles réguliers. « Cette façade thionvilloise de 190 m² est remarquable car elle est intégralement en pierre de Jaumont, précise l'entrepreneur. Notre défi était de faire en sorte que notre intervention soit la moins visible possible, pour rendre à la pierre son état d'origine. » Tout a été mis en œuvre pour respecter ce matériau, à commencer par les percements nécessaires à la fixation de l'échafaudage, réalisés intégralement dans les joints. Ensuite, la pierre a été délicatement nettoyée par hydrogommage, c'est-à-dire par projection à basse pression d'eau additionnée de microfibres de verre. Une opération qui a permis aux compagnons de mettre en évidence tous les endroits de la façade où la pierre était dégradée, pour retirer les morceaux cassés et recréer les parties manquantes.
« C'est le cœur de notre savoir-faire, ajoute Romain Giaroli. Ces réparations sont réalisées grâce à un mortier spécifique à base de poussière de pierre et de chaux aérienne, que nous préparons en utilisant un nuancier pour obtenir une teinte identique à celle de la façade d'origine. Le jeu consiste à retoucher au minimum nécessaire, l'illusion doit être totale. » De même, la teinte des joints existants est reproduite à l'identique dans une recherche d'harmonisation complète.
Ce type de travaux relève de bonnes pratiques, consignées notamment dans les guides de recommandations du ministère de la Culture pour les interventions sur le patrimoine bâti. Comme l'explique l'entrepreneur thionvillois, elles sont rarement enseignées dans les écoles, mais transmises le plus souvent par les artisans dans le cadre de l'apprentissage. Pour l'entreprise Giaroli, il s'agit d'une expertise acquise par l'expérience des chantiers, qui se traduit notamment par la qualification Qualibat 2142 « Réparations en maçonnerie ».
Bien que l'immeuble ne soit pas situé dans un périmètre protégé, ce qui rend cette procédure non obligatoire, le maître d'ouvrage a demandé et obtenu un avis des Architectes des bâtiments de France, dont les préconisations rejoignent les principes mis en œuvre par l'entreprise. Ce type de façade, comportant des matériaux sensibles à l'humidité, bénéficie d'une dérogation qui lui permet d'échapper à l'obligation de réaliser une isolation thermique - notamment par l'extérieur, ce qui serait une erreur de diagnostic - en cas de travaux de ravalement lourds (décret no 2016-711, en vigueur depuis le 1er janvier 2017).
Grâce à un traitement adapté, le soleil fait de nouveau luire les reflets dorés de la pierre de Jaumont.