Hisser nos métiers vers l'excellence

L’accueil par la France de la WorldSkills Competition en 2024 est une opportunité exceptionnelle de promouvoir les métiers en général et ceux du BTP en particulier, en montrant toute leur modernité. WorldSkills France et tout un réseau de bénévoles sont mobilisés pour susciter dès les sélections régionales le plus grand nombre de candidatures et accompagner les jeunes dans un parcours d’excellence. En portant au plus haut niveau les valeurs de professionnalisme et de transmission de l’apprentissage.

9:3001/12/2020
Rédigé par FFB Nationale
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bam 61 couverture
Bâtimétiers Numéro 61 | Décembre 2020

Quelle est votre ambition pour la France dans la perspective de la WorldSkills Competition à Lyon en 2024 ?

Armel Le Compagnon — Lyon 2024 sera une vitrine exceptionnelle. Notre ambition est que la France s’en saisisse pour créer une dynamique d’excellence autour de ses métiers et se place dans le top  5 des pays les plus médaillés. C’est un objectif ambitieux, sachant que nous avons terminé à la neuvième place lors des dernières finales mondiales WorldSkills à Kazan, en Russie, et que la concurrence va croissant, avec de nouveaux pays qui rejoignent la compétition à chaque édition. Au cours de la période récente, des pays émergents comme le Brésil ou de grandes puissances comme la Chine ou la Russie se sont hissés aux premières places, grâce à une mobilisation massive de leurs filières de formation. Tel est bien l’intérêt et l’enjeu des WorldSkills pour les pays en compétition : susciter une remise à niveau mondiale de leur formation professionnelle, en visant les standards internationaux les plus exigeants. Les médailles sont importantes, mais l’essentiel est dans ce mouvement collectif pour élever le niveau et atteindre l’excellence dans chaque métier, en se confrontant aux meilleurs. Parce que nous sommes le pays organisateur, Lyon 2024 nous donne un élan pour y parvenir.

 

Comment le BTP se situe-t-il dans les compétitions par rapport aux autres métiers ?

A. L. C. — Le BTP est traditionnellement le pôle qui ramène le plus de médailles à la France –  8 sur 27 en 2019 à Kazan  –, et ce n’est pas un hasard. C’est le secteur dont les organisations professionnelles et les filières de formation se mobilisent le plus fortement –  avec un volontarisme que l’on retrouve d’ailleurs face à la crise que nous traversons actuellement. Plus généralement, dans tous les métiers en compétition, l’une des missions prioritaires que s’est fixée WorldSkills France pour les prochaines années est de resserrer les liens avec les filières professionnelles et les centres de formation. En mettant à profit toute l’expertise accumulée au fil des années sur les sujets d’entraînement et de compétition, nos équipes se mettent à la disposition de ces filières pour accompagner les formateurs, pour montrer aux jeunes ce qu’est l’excellence dans le métier qu’ils sont en train d’apprendre –  et pour faire briller leurs yeux à l’idée de concourir. Les compétitions WorldSkills sont aussi l’occasion d’échanger entre pays sur la formation : dans la perspective de Lyon 2024, chaque pays participant sera en relation avec une école ou un centre de formation français, et ils définiront ensemble un projet de coopération commun.

L’essentiel est dans ce mouvement collectif pour élever le niveau et atteindre l’excellence dans chaque métier, en se confrontant aux meilleurs.

Armel Le Compagnon

Comment s’opèrent la sélection et la préparation des compétiteurs pour la WorldSkills Competition, et où en est-on actuellement du processus ?

A. L. C. — Entre deux finales internationales se déploie tout un cycle qui commence par les sélections régionales, organisées en France sous l’égide des conseils régionaux. Il est très important, dès ce stade, qu’un maximum de jeunes y participent, pour élargir le spectre et faire émerger les meilleurs dans chaque métier. À partir des compétitions régionales sont sélectionnées les équipes amenées à participer aux finales nationales. Les prochaines auront lieu à Lyon en 2021, le processus régional puis national a été décalé de plusieurs mois en raison de la crise de la Covid-19. Les finales nationales sont toujours un grand moment, avec près de 700  champions régionaux venus de toute la France. En 2021, après la sélection des titulaires pour l’équipe de France des métiers, commencera leur préparation, supervisée par WorldSkills France, pour les finales mondiales de la 46e  édition de la WorldSkills Competition, qui auront lieu en 2022 à Shanghai, donc deux ans avant Lyon 2024. Cette préparation mobilise de nombreux bénévoles –  experts métiers, jurés, préparateurs, etc.  –, que je tiens à remercier du fond du cœur. Tout un staff entoure ainsi les jeunes (qui doivent avoir moins de 23  ans au moment des finales mondiales) pour les entraîner techniquement et les amener vers l’excellence, mais aussi pour les préparer physiquement et mentalement, avec des coachs de niveau international. Les jeunes disent souvent que, en deux ans d’entraînement, entre les sélections régionales et les finales mondiales, ils ont gagné dix ans d’expérience ! De fait, l’objectif n’est pas d’en faire des bêtes à concours, mais de vrais professionnels, et d’excellents


Votre objectif n’est-il pas aussi de faire évoluer le regard des jeunes et du grand public sur les métiers ?

A. L. C. — À tous les stades de la compétition, les WorldSkills sont effectivement une occasion unique de promouvoir tous ces métiers souvent perçus, à tort, comme désuets, et de montrer au contraire toute leur modernité. À ce sujet, il y a dans la compétition WorldSkills une dimension de veille permanente sur l’évolution des métiers. Cela se reflète notamment dans les techniques et les outils –  numériques, notamment  – que les jeunes utilisent lors des compétitions, et qui sont à la pointe des progrès dans chaque secteur. Cette dimension de promotion des métiers est d’autant plus essentielle en France que l’apprentissage n’y est pas encore suffisamment valorisé. Or, les métiers sont des vecteurs d’épanouissement humain, et le système de l’alternance, entre la réalité pratique de l’entreprise et la réalité théorique de l’école ou du centre de formation, est particulièrement efficace en termes d’intégration dans la société. L’individu est placé au cœur de son parcours professionnel, de son histoire. Il devient, très jeune, acteur de sa destinée, autonome, ce qui n’empêche pas, dans certains secteurs comme le bâtiment, de pouvoir s’engager dans des filières longues. C’est donc une voie sur laquelle la réussite professionnelle est à la clé –  je ne connais pas de contre-exemples. La crise de la Covid-19 a d’ailleurs remis en lumière ces fondamentaux de l’apprentissage que porte le mouvement WorldSkills : la priorité donnée à l’humain, l’importance de l’économie réelle et de tous ces métiers dont nous avons tellement besoin, la perpétuation de savoir-faire locaux face à la mondialisation et, bien sûr, l’expertise métier, qui mène à l’excellence quand on l’explore à fond.

 

À titre plus personnel, quelle est votre motivation en tant que président de WorldSkills France ?

A. L. C. — J’ai eu en charge pendant une dizaine d’années la formation professionnelle au sein de la FFB. Ce nouveau mandat me permet d’exprimer pleinement ma sensibilité auprès de la jeunesse et mon engagement pour l’évolution de nos systèmes de formation, en jouant, à l’échelle d’un mouvement international, le rôle de transmetteur qui est le principe fondateur de l’apprentissage. Nous avons des métiers et une jeunesse extraordinaires, on le mesure pleinement lors des compétitions, avec toutes ces équipes et leurs supporters qui entourent les jeunes sur leurs stands et les poussent à faire encore mieux. Ce sont des moments inoubliables !

Armel Le Compagnon © WorldSkills France

Maçon de profession, formé chez les Compagnons du devoir, Armel Le Compagnon a créé en 1985 son entreprise, spécialisée dans la restauration de bâtiments et monuments historiques, basée en Haute-Loire. Au sein de la FFB, il a occupé successivement des responsabilités départementales, régionales et nationales, en présidant notamment, à partir de 2007, la commission nationale de formation. Il a découvert à cette occasion l’univers WorldSkills. Après avoir soutenu l’équipe de France lors des finales mondiales à Calgary (2009), il s’investit pleinement dans le mouvement afin de promouvoir l’excellence des métiers de mains et les débouchés qui s’offrent à eux. Il rejoint WorldSkills France en 2016 en tant que trésorier, avant d’en être élu président en mai 2020, à l’issue des deux mandats exercés avant lui par Michel Guisembert.

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