- Mot(s) clé(s) :
- Restauration du patrimoine
Lire un bâtiment ancien pour en reconstituer les parties disparues
Le contenu est réservé à nos adhérents. Pour le consulter
Nicolas de Laâge de Meux, propriétaire du château de l’Herm, en Dordogne, et Amélie Legagneux qui s’est investie dans cette restauration à ses côtés.
Taille de pierre : laisser l’initiative à l’artisan
Les travaux de taille de pierre ont été réalisés en pierre d’Avy, venue de Charente-Maritime, un calcaire blanc au faciès « éveillé » qui capte la lumière, proche de la coloration d’origine. Ils ont été menés en majeure partie dans les ateliers de SN Billion Centre, une entreprise spécialisée « monuments historiques » établie à La Roche-Clermault (Indre-et-Loire). « Ce chantier se distingue par son ampleur, on restitue l’intégralité du chemin de ronde avec son parapet et ses corbeaux, et cinq lucarnes complètes de style xve siècle, ce qui est très rare, témoigne Frédéric Bourreau, dirigeant de l’entreprise. Notre travail est d’autant plus passionnant que nous pouvons proposer des calepins de taille originaux, qui sont validés par l’architecte. » Les fleurons, les crochets et les pinacles qui ornent les lucarnes, inspirés par le portail d’entrée, sont restitués par le sculpteur, comme cela se faisait à la Renaissance.
Maçonnerie : restaurer en respectant l’existant
Cette restauration hors norme a donc consisté à interpréter les traces des ouvrages disparus pour les redessiner et les reconstruire, avec la volonté d’être le plus proche possible du bâti d’origine. « Nous avons été surpris de constater que les maçonneries ont bien résisté aux pénétrations d’eau et au gel », constate Georges Lafaye, dirigeant des Compagnons Réunis, une entreprise de maçonnerie et taille de pierre qualifiée « monuments historiques », qui emploie 35 salariés à La Bachellerie (Dordogne). « Nous avons gardé au maximum en l’état la maçonnerie, en remplaçant les moellons manquants ou défectueux, et les vieux enduits existants, que nous avons refaits à l’identique aux endroits les plus abîmés », explique-t-il. Certaines parties manquantes – des arases de murs qui supportent la charpente aux encorbellements pour les machicoulis, et surtout les corbeaux soutenant le parapet qui avait complètement disparu – ont exigé des reconstitutions plus importantes. Les encadrements des baies à traverses et meneaux, très ouvragés, ainsi que les lucarnes en pierre de taille, réinventées par l’architecte qui s’est inspiré d’ouvrages similaires dans des châteaux environnants, ont été réalisés dans les ateliers de la société SN Billion Centre (voir encadré). De même, les trois cheminées aux armoiries du premier bâtisseur ont fait l’objet de greffes de pierre et d’un délicat ragréage suivi d’une patine de finition, tandis que la grande salle du corps de logis a retrouvé son sol d’origine en pisé.
Une charpente « fantôme » déduite de la lecture du monument
La charpente, dont il ne restait rien, a donné lieu à une entière restitution. Comme il l’avait déjà fait pour les lucarnes et pour les modénatures des poutres des planchers, l’architecte s’est inspiré de châteaux construits à la même période dans la région pour faire un premier dessin, qui a été remis aux Ateliers Férignac, implantés à Hautefort (Dordogne) et spécialisés dans la réalisation de charpentes anciennes. « Le défi que nous avons relevé était passionnant car, en accédant aux arases, nous avons pu situer les empochements, et en déduire la section et l’inclinaison des poutres initiales, explique le responsable du chantier, Denis Glémin. Cette “lecture” du monument nous a permis d’adapter le dessin initial à la géométrie de la maçonnerie, pour arriver à une charpente très proche de celle qui avait existé. » De même, les larmiers présents au-dessus des souches de cheminées ont donné de précieuses indications sur la hauteur précise où se trouvait la charpente. Grâce à ce travail de reconstitution, le logis est aujourd’hui recouvert d’une spectaculaire charpente traditionnelle à tenons et mortaises, qui a exigé près de 100 m3 de chêne. Pour conserver un aspect ancien harmonisé avec les façades, la couverture a été réalisée avec 40 000 tuiles plates de récupération, de différentes dimensions et colorations, qui donnent tout son caractère à la toiture. Démarrée en 2020 et prévue jusqu’en 2027, l’opération se poursuivra par les restaurations des tours nord et sud et de la tour d’escalier, suivies de l’ensemble des finitions, des aménagements extérieurs et enfin des lots techniques. « Nous espérons que ce château pourra ainsi, après avoir traversé cinq cents ans, vivre cinq siècles supplémentaires », conclut Nicolas de Laâge de Meux, celui qui l’a ressuscité.
Nous avons gardé au maximum en l’état la maçonnerie, en remplaçant les moellons manquants ou défectueux, et les vieux enduits existants, que nous avons refaits à l’identique aux endroits les plus abîmés.
Contenu réservé aux adhérents FFB
- Profitez aussi de conseils et de soutien
Des services de qualité, de proximité, avec des experts du Bâtiment qui connaissent vos enjeux métier et vous accompagnent dans votre quotidien d'entrepreneur.
- Intégrez un réseau de 50 000 entreprises
La FFB est fière de représenter toutes les entreprises du bâtiment, les 2/3 de nos adhérent(e)s sont des entreprises artisanales.
- Bénéficiez des dernières informations
Recevez Bâtiment actualité 2 fois par mois pour anticiper et formez-vous aux évolutions des métiers ou de la législation.