Rénovation : de palais de Justice à hôtel quatre étoiles

Une remise en état de haut vol

Certes, Covid et confinements successifs ont pesé de tout leur poids sur ce chantier. Il a fallu rattraper le temps d’inactivité. « Le chantier, démarré en octobre 2019, a duré quatre mois de plus que prévu pour se terminer en juin 2021 », se souvient Laurent Guay, président de l’entreprise de peinture Pinxyl à Montlouis-sur-Loire (Indre-et-Loire). Sous la houlette de Jean Baillet, du cabinet d’architecture Arc A3 Sud Touraine à Loches, « l’objectif a été de préserver l’esthétique originelle à l’extérieur, avec le concours des Architectes des bâtiments de France, et d’apporter à l’intérieur une décoration contemporaine tout en conservant l’esprit du lieu », précise le peintre, qui a réalisé les élégants nouveaux décors de ce bâtiment.

Dès la réception, le ton est donné : plusieurs bustes d’anciens magistrats, auparavant situés à l’extérieur, veillent sur l’hôtel, sous la lumière de suspensions dorées modernes. Pour restaurer sans le dénaturer ce patrimoine d’exception, il a d’abord fallu effacer les traces d’une décennie de fermeture et de dégradation : boiseries attaquées par les mérules à déposer, plâtre à repiquer entièrement… La façade riche en modénatures, érigée en tuffeau – une pierre massive locale – et en épaisseur de 60 cm, a dû être retaillée au niveau des corniches et des lucarnes. En certains endroits, elle a aussi subi des refouillements pour y loger des pierres neuves sur quelques centimètres d’épaisseur. Performance thermique oblige, des doubles vitrages sont venus équiper les fenêtres par creusement des feuillures existantes.

Pour autant, afin de conserver l’esthétique extérieure originelle et conformément aux directives des Architectes des bâtiments de France, les menuiseries en bois du XIX^e siècle ont été restaurées. Environ 1.200m² de surfaces de peinture ont recouvert les extérieurs, dont la majorité pour les fenêtres d’époque.

Des teintes sobres et chics

À l’intérieur, au rez-de-chaussée du bâtiment séculaire, dans les grandes salles d’audience de 7,50 m de hauteur sous plafond, des planchers intermédiaires ont été réalisés. Dans le majestueux hall d’entrée, le volume de l’ancienne salle des pas perdus a été gardé. Le nouveau décor du palais de Justice a été mis en peinture par cinq compagnons : 10 000 m2 ont été appliqués pour traiter les plafonds, murs et menuiseries. Le lifting opéré en amont avec soin « a permis de conserver une grande partie des boiseries.

Pour les peintures, qui jouent ici un rôle essentiel dans le décor, l’architecte a exprimé le souhait de retrouver des teintes d’antan », indique Laurent Guay. Il a ainsi opté pour des associations de gris brun soutenu au vert d’Égypte allié à des jaunes ocrés et des tonalités orange. Si ces teintes apportent de la modernité, elles restent sur des tons sobres, chics, dans le style propre à cette époque.

Dans six des quarante-cinq chambres, poutres et entrevous s’animent en contraste dans les teintes jaune, vert et rouge telles qu’on les mariait au xixe siècle. Dans la piscine intérieure et au niveau du spa, dans les anciennes caves voûtées, il a fallu opter pour un revêtement mural technique.

« Pour résister à la chaleur et à l’humidité, nous avons traité les murs avec des peintures bi-composantes d’aspect brillant », précise le dirigeant de l’entreprise Pinxyl. Cosy, chaleureux et majestueux, tout en conservant son ADN, ce nouveau bâtiment donne envie, pour une fois, de passer sa nuit au tribunal.