Réemploi - Sous les matériaux et déchets, la valeur

Voulu par les pouvoirs publics, orchestré par les éco-organismes, le réemploi, encore marginal aujourd’hui, est un levier majeur pour décarboner l’acte de construire. Malgré les obstacles, de la disponibilité de la ressource à la question de l’assurabilité, et si son modèle économique reste à inventer, il rallie un nombre croissant de maîtres d’ouvrage et fait déjà l’objet de nombreuses initiatives au sein des entreprises. Illustrations.

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Bâtimétiers Numéro 76 | septembre 2024

Faux plafonds, faux planchers, dalles de moquette, portes, sanitaires, robinetterie… voici quelques exemples de produits de réemploi que l’on peut aujourd’hui mettre en œuvre dans la construction. Selon le Code de l’environnement (art. L. 541-1-1), le réemploi est défini comme « toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus ».

 

Dans le langage courant, le réemploi recouvre aussi souvent la réutilisation définie au même article comme « toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui sont devenus des déchets sont utilisés de nouveau ». À noter que seule la France opère cette distinction sémantique alors que nos voisins européens englobent les deux notions sous le terme « to reuse ».

 

Attention à ne pas confondre le réemploi avec les produits ou matériaux recyclés qui sont fabriqués à partir des matières premières issues du recyclage (plâtre à partir de gypse recyclé, panneaux de particules à partir de bois recyclés, etc.). Le recours au réemploi est aujourd’hui très marginal, puisque l’on estime que 1 % seulement du gisement des déchets du bâtiment, sur les 46 millions de tonnes de la filière, est réemployé.

 

Il est cependant favorisé par un contexte réglementaire incitatif : la loi Anti-gaspillage et économie circulaire (Agec) du 10 février 2020 prévoit notamment la mise en place d’une filière à responsabilité élargie du producteur (REP) pour les déchets du bâtiment, l’évolution du diagnostic « déchets » vers un diagnostic « PEMD »(1) intégrant une dimension réemploi, et la mise en place d’objectifs de réemploi dans les achats des collectivités. Parmi les objectifs fixés aux éco-organismes de la filière REP Bâtiment – Écomaison, Valobat, Valdelia, Écominéro – figure celui d’atteindre 4 % en masse de déchets du bâtiment réemployés en 2027, puis 5 % en 2028, des objectifs ambitieux à des échéances très proches.

 

« Le réemploi, qui reste aujourd’hui très peu pratiqué sur les chantiers, est principalement le résultat d’une décision du maître d’ouvrage et de l’assistant à maîtrise d’ouvrage (AMO), qui utilisent ce levier pour réduire l’empreinte carbone de leurs opérations et qui en ont fait une stratégie de différenciation », constate Alban Vibrac, dirigeant de la menuiserie Vibrac, qui emploie une cinquantaine de salariés à Bois-de-Haye (Meurthe-et-Moselle), par ailleurs président du groupe de travail Réemploi au sein de la FFB.

 

« Les entreprises doivent s’y préparer, préconise-t-il, car il va petit à petit se généraliser. » Par exemple, dans le cadre de la RE 2020, par convention, il est admis que les matériaux et produits de réemploi sont comptabilisés comme émettant « zéro carbone » – même s’il faut les trier, les transporter, parfois les remettre en état –, ce qui est très intéressant pour répondre aux exigences imposées. Cependant, les entreprises sont encore peu aguerries aux pratiques nouvelles du réemploi, et plusieurs freins s’opposent à leur essor.

 

« Il y a tout d’abord un problème de disponibilité de la ressource, autrement dit où et comment trouver des produits de réemploi, ajoute Alban Vibrac. Plus encore se pose la question de l’assurabilité des produits de seconde main qui perdent leur garantie par les industriels, en particulier quand ils répondent à une exigence réglementaire, par exemple pour des portes coupe-feu. »

 

Le chef d’entreprise évoque aussi la question du coût et d’un nécessaire changement des mentalités : non seulement les produits de réemploi ne sont pas toujours moins chers, mais bon nombre d’acquéreurs de logements neufs, par exemple, ne semblent pas prêts à accepter que ceux-ci soient équipés avec des produits de seconde main.

 

Enfin, pour que le réemploi se fasse à grande échelle, il faudra aussi que les éco-organismes accélèrent le mouvement et jouent pleinement leur rôle dans l’identification et la collecte des matériaux à destination du réemploi, en particulier auprès des entreprises.

Le réemploi est principalement le résultat d’une décision du maître d’ouvrage et de l’assistant à maîtrise d’ouvrage, qui utilisent ce levier pour réduire l’empreinte carbone de leurs opérations et qui en ont fait une stratégie de différenciation.

Alban Vibrac, dirigeant de la société éponyme, à Bois-de-Haye (Meurthe-et-Moselle) et président du groupe de travail Réemploi au sein de la FFB.
© DR

Cabestan, une coopérative mobilisée pour le réemploi

 

 

Créée il y a un peu plus de vingt ans, la coopérative d’activité et d’emploi (CAE) Cabestan, implantée à Grenoble (Isère), réunit aujourd’hui 270 entrepreneurs du bâtiment, dont 80 % sont issus d’une reconversion professionnelle, dans une soixantaine de métiers. Sa vocation est d’accompagner les porteurs de projets, en leur fournissant un ensemble de services support – administratif, technique, veille normative, formation, etc. – pour les aider à développer leur activité. Les adhérents de Cabestan partagent aussi un ensemble de valeurs sociétales, contenues dans une charte qui fait la promotion du projet collectif, des savoir-faire traditionnels et de l’éco-construction, en associant écologie et modèle économique viable. Cabestan fait partie du Club RSE de la Fédération SCOP BTP, et a adhéré récemment à la FFB de l’Isère.

 

À la fois diplômé en architecture, designer et artisan menuisier au sein de la coopérative, Thibaut Defrance a été à l’origine, en 2019, d’un groupe de travail sur le thème de l’éco-responsabilité et du réemploi, qui planche sur les questions de la gestion des déchets, des changements réglementaires liés à la REP, de l’assurabilité des produits de réemploi, et sur la mise en place d’indicateurs pour mesurer les économies de CO2 liées au réemploi. « Notre objectif est d’offrir à nos entrepreneurs, maîtres d’œuvre ou artisans, une boîte à outils pour qu’ils puissent intégrer le réemploi dans leur activité et le proposer à leurs clients, explique-t-il. Pour cela, nous sommes en train de créer une formation dédiée et un écosystème qui les met en relation notamment avec les acteurs positionnés dans le diagnostic PEMD précédant les déconstructions, et les plateformes de réemploi situées dans notre périmètre. »

 

Cabestan se positionne ainsi comme un acteur expert du réemploi. La coopérative participe par exemple à des opérations de déconstruction pilotes avec récupération des matériaux pour le compte des établissements publics fonciers locaux (EPFL), et constate avec satisfaction les exigences croissantes des maîtres d’ouvrage en la matière.

 

Thibaut Defrance, architecte, designer, artisan menuisier pour Cabestan, Grenoble (Isère).

De la démolition à la déconstruction avec réemploi

 

Étant donné que 49 % des déchets du bâtiment proviennent de la démolition – contre 38 % de la réhabilitation, et 13 % de la construction neuve –, les professionnels du secteur ont un rôle clé à jouer dans le réemploi, dont ils sont en quelque sorte les premiers fournisseurs. Pour intégrer cette nouvelle problématique, le métier de démolisseur a d’ailleurs fortement évolué vers celui de déconstructeur, à l’image d’IDF Déconstruction (anciennement IDF Démolition, rebaptisée en 2024), implantée à Wissous (Essonne).

 

Cette entreprise est partie prenante du groupe Ixio, qui comprend aussi trois entreprises de désamiantage, ainsi que la société Backacia – qui exerce le métier d’AMO réemploi, tout en possédant sa propre marketplace spécialisée dans le réemploi – et une entreprise de chauffage et de climatisation, qui peut diagnostiquer l’état des équipements actifs récupérés, ce qui donne au groupe un ensemble de compétences complémentaires.

 

« Deux cas de figure peuvent se présenter. Soit le réemploi est présent au niveau du DCE, et le maître d’ouvrage a déjà nommé un AMO réemploi qui précommercialise les produits récupérés ; nous faisons alors une offre pour exécuter les travaux de curage et de dépose soignée pour réemploi ; soit le réemploi n’est pas prévu dans le marché, et nous sensibilisons le maître d’ouvrage en proposant de l’intégrer à son opération », explique Louise Aumont, directrice Économie circulaire et réemploi chez IDF Déconstruction.

 

Sur 10.000 à 15.000 tonnes de déchets produits par an, l’entreprise traite entre 150 et 200 tonnes de réemploi, parmi lesquelles notamment les portes, les vasques et éléments sanitaires de salle de bains, les kitchenettes équipées dans les bureaux, mais aussi les isolants qui sont dans les cloisons, autant de produits pour lesquels il faut trouver une seconde vie : « Notre défi principal est de trouver un repreneur suffisamment vite pour pouvoir les déposer dans les temps, sans pénaliser le calendrier du chantier de déconstruction, ajoute Louise Aumont. En fonction des matériaux, ils peuvent être remis en vente sur la marketplace de Backacia ou sur une autre, ou stockés dans nos locaux, s’ils ont une valeur ajoutée telle que nous savons que nous trouverons un repreneur. »

 

Le réemploi est donc inclus dans le modèle économique de l’entreprise : la dépose soignée qu’il nécessite est facturée au maître d’ouvrage s’il souhaite récupérer les produits de réemploi et, dans le cas contraire, l’entreprise finance dans certains cas ces opérations en revendant le produit de la dépose. Ce type d’approche sélective prenant du temps et ayant un coût, IDF Déconstruction s’est tout de même engagée à réaliser du réemploi sur chaque opération sans demande particulière.

 

Par ailleurs le SEDDRe(2) travaille actuellement avec Qualibat afin d’élaborer une qualification « dépose soignée », pour que ces compétences soient mieux identifiées par les maîtrises d’ouvrage. Si le mouvement s’accélère, le réemploi n’est pas encore systématique : « En 2023, nous avons réalisé quinze opérations de réemploi sur un total de dix-neuf chantiers, mais le réemploi était prévu au marché sur seulement deux d’entre eux. Bien qu’obligatoire à partir de 1 000 m2, le diagnostic PEMD n’est pas suivi en général par du réemploi », ajoute Louise Aumont.

Notre défi principal est de trouver un repreneur suffisamment vite pour pouvoir déposer les éléments dans les temps, sans pénaliser le calendrier du chantier de déconstruction.

Louise Aumont, directrice Économie circulaire et réemploi chez IDF Déconstruction, à Wissous (Essonne).

Une filière de réemploi active : les sols souples

 

Certaines filières ont déjà pris quelques longueurs d’avance, en particulier celles qui mettent en œuvre des produits de second œuvre non structurels, autrement dit qui ne menacent pas la stabilité du bâtiment.

 

C’est le cas par exemple des revêtements de sols souples et des moquettes en dalles, qui bénéficient aujourd’hui d’un écosystème composé d’entreprises qui récupèrent les produits lors des opérations de curage, les déposent, les trient et les traitent, et soit les stockent elles-mêmes, soit s’adressent à des plateformes spécialisées qui les proposent à des repreneurs via leur site Internet.

 

 « Les maîtres d’ouvrage sont aujourd’hui demandeurs de moquettes de réemploi, mais il n’est pas toujours facile de leur donner satisfaction car il s’agit d’une ressource rare », témoigne Boris Voeltzel, directeur général de Delaval, une entreprise spécialisée dans la fourniture et pose de revêtements de sols souples et l’aménagement d’espaces, qui emploie 35 salariés à Courbevoie (Hauts-de-Seine).

 

« En effet, lors d’un curage, explique-t-il, nous récupérons au mieux 20 % du total de la moquette car beaucoup de dalles ne sont pas entières, ou sont usagées ou percées, donc irrécupérables, sans oublier que la pose collée nous oblige souvent à les arracher, ce qui amoindrit leurs performances techniques. » Pour répondre aux atten­tes des donneurs d’ordre, Delaval affecte plutôt la moquette de réemploi aux zones « non nobles » – coins sombres, réser­ves, couloirs… – pour éviter le côté déceptif d’une moquette qui a déjà été exposée à la lumière un ou deux ans et présentera, de ce fait, une légère différence de teinte par rapport à une neuve.

 

Pour dévelop­per le réemploi, le chef d’entreprise se livre aujourd’hui à une action d’« évangélisation » de ses clients, pour lever les freins qui subsistent encore. Il s’agit notamment de leur faire comprendre que, quand on utilise de la moquette de réemploi, on ne peut pas avoir les mêmes exigences qu’avec de la moquette neuve ; il faut souvent accepter une variante selon le gisement disponible, une qualité ou une couleur différente de celle souhaitée. Faire du réemploi pousse aussi à sortir du schéma habituel et à être créatif, comme le montre le concept Loop, inventé par Delaval, qui consiste à réuti­liser un autre gisement considérable, évalué à 400.000 m2 par an, celui des chutes de pose.

 

« Nous avons toujours entre 5 et 10 % de chutes de pose sur les chantiers, liées aux découpes, aux arrondis, etc., que nous récupérons et transformons en lames de 10 cm de large sur 50 cm de long, précise le chef d’entreprise. Comme elles sont de différentes couleurs, nous les utilisons pour créer des compositions avec un design intéressant sur le plan décoratif, une manière souriante d’inciter nos clients à faire du réemploi. »

 

La moquette de réemploi représente aujourd’hui 10 % des produits mis en œuvre par l’entreprise, qui peut proposer un mix entre moquette neuve, de réemploi et concept décoratif Loop à base de chutes de pose.

© DR

Le réemploi, une seconde nature pour les entreprises du patrimoine

Pierre de taille, moellons, lauzes, tuiles, ardoises, terre cuite, éléments de charpente en bois… les entreprises qui interviennent sur les monuments historiques ou sur le patrimoine pratiquent le réemploi depuis fort longtemps.

 

« La doctrine que nous appliquons est basée sur la conservation et sur le remplacement des matériaux usagés par des matériaux qui sont le plus proche possible du bâti existant », explique Stéphane Raffault, codirigeant des entreprises Louis Geneste et Maurice Nailler, respectivement positionnées sur la maçonnerie et taille de pierre, et sur la charpente et couverture, qualifiées Qualibat « Monuments historiques ». La nécessité de réduire le bilan carbone des constructions n’a que peu d’incidence dans le réemploi pratiqué dans le bâti ancien, qui a pour ressort la recherche de l’authenticité du bâti, et la cohérence technique qui garantit sa longévité.

 

« Notre défi aujourd’hui est plutôt d’avoir accès aux matériaux de réemploi dont nous avons besoin et qui se font rares, ajoute le chef d’entreprise. Pour cette raison, nous avons constitué un stock très important de produits soit récupérés sur nos chantiers, soit rachetés lors d’opérations de rénovation, que nous avons soigneusement répertoriés et numérisés, en vue de nos chantiers à venir. »

 

À titre d’exemple, l’entrepreneur a racheté et stocké pendant plus de dix ans des lots de lauzes, un matériau devenu très rare depuis la fermeture des carrières d’extraction, qu’il a pu utiliser pour la restauration d’une église située en Auvergne, sans quoi l’édifice aurait perdu sa couverture d’origine.

 

L’un des obstacles majeurs au réemploi, l’assurabilité des ouvrages, a été levé moyennant des calculs réalisés en bureau d’études et des contrats d’assurance qui permettent aux entreprises qualifiées « Monuments historiques » de travailler hors DTU. En réutilisant des matériaux extraits ou fabriqués autant que possible à proximité des chantiers, les entreprises du patrimoine ont déjà depuis longtemps un modèle vertueux sur le plan de leur empreinte carbone.

 

Stéphane Raffault, codirigeant des entreprises Louis Geneste et Maurice Nailler à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme).

Franchir la barrière de l’assurabilité

 

Certaines filières sont moins avancées, comme c’est le cas par exemple de l’enveloppe des bâtiments. « Nous n’utilisons pratiquement pas, pour l’instant, de produits de réemploi sur nos ouvrages », témoigne Jérôme Martel, directeur technique de l’activité Couverture, isolation, étanchéité et bardage, au sein du groupe Ramery, dont le siège social se situe à Erquinghem-Lys (Nord), et membre des groupes de travail réemploi de la FFB et de la Chambre syndicale française de l’étanchéité et du bardage (CSFE-FFB).

 

« La raison, explique-t-il, est simple : pour bénéficier d’une assurabilité, les produits que nous mettons en œuvre doivent être conformes à l’environnement normatif en vigueur dans le contexte de techniques courantes, c’est-à-dire aux NF DTU et aux Avis techniques, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui des produits de réemploi. » L’aspect assurantiel est donc la principale pierre d’achoppement dans les domaines où les produits et matériaux doivent répondre à des exigences techniques pour garantir la stabilité des bâtiments, ce qui est le cas de ceux qui composent l’enveloppe et, plus généralement, des produits structurels (sauf exception, voir plus loin).

 

Cependant, dans l’absolu, tous les matériaux qui composent l’enveloppe – isolants, membranes, bitumes, bardages… – pourraient faire l’objet d’un réemploi, à condition qu’ils aient conservé leurs performances et caractéristiques (géométrie, par exemple) techniques. C’est pourquoi la filière est aujourd’hui mobilisée.

 

Trois groupes de travail ont été créés au sein de la CSFE-FFB, réunissant entreprises et industriels pour la création de Recom­mandations Professionnelles Réemploi portant sur trois matériaux : les granulats de protection d’étanchéité, les dalles de protection d’étanchéité et les éléments de bardage en acier. Le CTICM(3) et l’EMB(4) sont associés au groupe de travail sur les éléments de bardage en acier.

 

« En établissant une méthodologie pour les déposer et un ensemble de contrôles qualité incontournables, ces recommandations vont permettre de redonner des lettres de noblesse à ces produits, et ainsi conduire à une assurabilité pour un réemploi sans risque », ajoute le directeur technique. Ces recommandations doivent être proposées à l’AQC (Agence Qualité Construction), avec pour objectif qu’elles soient validées par la Commission Prévention Produits (C2P) en 2025.

 

À la question assurantielle s’ajoute une équation économique dont il faut changer les termes : « Les produits de réemploi sont aujourd’hui aussi chers, voire plus chers, que des produits neufs, en raison des opérations de remise en état et de contrôle qu’ils requièrent, ajoute Jérôme Martel.

 

Mais il faut bien voir que bon nombre de produits neufs viennent souvent de très loin, avec un coût carbone de fabrication et de transport très élevé, que nous n’intégrons pas encore dans leur prix. Au regard de ces critères, le produit de réemploi est donc beaucoup moins impactant, avec un coût global, et notamment environnemental, bien inférieur pour la planète. Il faut bien comparer ce qui doit être comparable ! »

Le produit de réemploi est beaucoup moins impactant, avec un coût global, et notamment environnemental, bien inférieur pour la planète.

Jérôme Martel, ancien directeur technique de l’activité Couverture, isolation, étanchéité et bardage, au sein du groupe Ramery, à Erquinghem-Lys (Nord)

La construction métallique en premier de cordée

 

Déjà première de la classe en matière de recyclage, puisque le métal est déjà collecté et refondu à volonté pour de nouvelles utilisations depuis de longues années, la filière de la construction métallique a également pris une longueur d’avance pour le réemploi.

 

En effet, les éléments de structure métallique de réemploi disposent d’un référentiel professionnel du CTICM, validé début 2024 par la C2P de l’AQC, ce qui fait d’eux les seuls matériaux de structure de réemploi qui bénéficient d’une assurabilité au même titre qu’une technique courante.

 

Une avancée normative qui a modifié la façon de travailler des entreprises du secteur, et qui préfigure l’avenir du réemploi dans toutes les filières du bâtiment : « Deux possibilités s’offrent désormais à nous quand nous démantelons un bâtiment en métal : soit nous démontons tout et revendons les matériaux au poids à la filière de recyclage par refonte du métal, soit nous le déconstruisons dans l’optique de réemployer les éléments de charpente, une prestation plus complexe, pas nécessairement plus chère, mais qui intéresse de plus en plus de maîtres d’ouvrage avec aussi la possibilité de revendre les éléments indépendamment sur des plateformes spécialisées », explique Émile Seta, chef de projet réemploi chez Viry, une entreprise de Fayat Métal, la division construction métallique du groupe Fayat.

 

À condition de respecter les recommandations du nouveau référentiel pour le réemploi des charpentes métalliques, il est donc aujourd’hui possible de reprendre les éléments démontés, de les refaçonner et de les adapter pour construire une nouvelle charpente, pour des bâtiments appartenant à la classe d’exécution EXC2 selon la norme EN 1090-2, et même à la classe d’exécution EXC3, à condition que les éléments réemployés aient déjà été conçus pour un bâtiment appartenant à cette catégorie.

 

« Dans le cas où le maître d’ouvrage choisit le réemploi, plus la maîtrise d’œuvre effectue son travail de conception à partir des éléments qui seront réemployés, plus elle limite les coûts de refaçonnage et d’adaptation, en optimisant la compétitivité économique du projet par rapport au neuf », ajoute le chef de projet Réemploi. Le groupe Fayat a ainsi réalisé grâce à cette approche plusieurs opérations presque au même coût que le neuf, parmi lesquelles deux grandes verrières dans la cour du collège Clemenceau d’Épinal, avec ICS Bois et l’agence Cartignies Canonica Architecture, pour le compte du conseil départemental des Vosges.

 

Deux verrières existantes, trop petites pour protéger de la pluie, ont été démontées ; leurs poutrelles métalliques ainsi que les verres, tôleries et supports de vitrage en alu ont été intégralement adaptés en atelier et remis en œuvre dans le nouveau projet. « Si le réemploi est encore marginal dans le bâtiment, les initiatives se multiplient pour le développer dans toutes les filières, et l’idée de réemployer des matériaux et produits existants plutôt que des neufs, chaque fois que cela est possible, fait son chemin au sein de nos entreprises, conclut Alban Vibrac.

 

Le groupe de travail Réemploi de la FFB remettra officiellement sa doctrine, fruit de ses travaux, à la fin 2024. » Il s’agit en tout cas d’une nouvelle mutation profonde dans l’acte de construire, qui fera de l’éco-construction une étape préalable à tout projet, pour que la conception des bâtiments prenne en compte la facilité de démantèlement de ses composants en fin de vie en vue de leur réemploi. Comme toute mutation, elle exige d’ores et déjà des compétences nouvelles, synonymes de création d’emplois dans les territoires et d’opportunités pour les entreprises.

Dans le cas où le maître d’ouvrage choisit le réemploi, plus la maîtrise d’œuvre effectue son travail de conception à partir des éléments qui seront réemployés, plus elle limite les coûts de refaçonnage et d’adaptation, en optimisant la compétitivité économique du projet par rapport au neuf.

Émile Seta, chef de projet Réemploi chez Viry, une entreprise de Fayat Métal.
  1.  Le diagnostic PEMD fournit les informations sur les produits, équipements, matériaux et déchets attendus des opérations de démolition ou de rénovation significative en vue, en priorité, de leur réemploi ou, à défaut, de leur valorisation. 
  2. Syndicat des entreprises de déconstruction, dépollution et recyclage.
  3. Centre technique industriel de la construction métallique.
  4. Enveloppe métallique du bâtiment : association de fabricants de panneaux, profils et systèmes métalliques.

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