Pourquoi ne pas réutiliser les mannequins en bois à l'issue du chantier ? L'idée a germé il y a une dizaine d'années dans la tête d'Hervé Keller, directeur général de Dupré SAS, une entreprise de menuiserie qui emploie une quarantaine de salariés à Chazé-Henry (Maine-et-Loire). Son chiffre d'affaires se répartit aux deux tiers dans les travaux de menuiserie intérieure et agencement, notamment dans le cadre de marchés publics, et pour un tiers dans la fabrication de mannequins destinés aux réservations dans les murs banchés - qu'elle vend, loue et désormais recycle. « Il y a dix ans, nous avons proposé à notre clientèle d'entreprises de maçonnerie et gros oeuvre de récupérer et de recycler leurs mannequins en bois, pour leur donner une seconde vie, moyennant un surcoût, raconte Hervé Keller. Mais à l'époque, on parlait encore très peu d'économie circulaire, et la gestion des déchets était mutualisée dans le compte prorata du chantier, ce qui n'aurait pas dû être le cas. »
Depuis, la question des déchets a pris une place centrale, de même que la responsabilité environnementale des entreprises, et les acteurs institutionnels ont pris l'initiative. Répondant à l'appel à projets « Économie circulaire » lancé en 2018 par la région Pays de la Loire, Dupré SAS a pu ainsi remettre au goût du jour son projet de recyclage des mannequins en bois, pour lequel elle a été déclarée lauréate début 2019.
Le process mis au point par l'entreprise est aujourd'hui validé et éprouvé. Les mannequins destinés au recyclage sont écoconçus, c'est-à-dire de façon à ce que les matériaux puissent être démontés facilement à la récupération en fin de chantier et réutilisés à 80 %, tandis que les peaux coffrantes sont intégralement refaites pour obtenir des performances égales à celles d'un produit neuf. Reste la question du surcoût lié à l'écoconception, et plus encore à la main-d'oeuvre nécessaire aux opérations de recyclage, pour lequel l'entrepreneur avance des solutions : « Avec la CCI d'Angers et la FFB Maine-et-Loire et Loire-Atlantique, nous sommes actuellement en discussion avec la région pour intégrer une clause comportant les mannequins recyclés dans le cahier des charges des marchés publics, explique Hervé Keller. En contrepartie, nous envisageons de faire réaliser les opérations de recyclage par des organismes de réinsertion, ce qui permettrait aux entreprises utilisatrices de mannequins recyclés de participer à l'économie circulaire et à l'économie solidaire. »