Une reprise soutenue...
Pour le bâtiment, la reprise est bel et bien là. De fait, l'acquis de la première moitié de 2017 et les perspectives pour la seconde laissent espérer une croissance de l'activité supérieure à 4 %, donc sensiblement plus forte qu'initialement prévu (+ 3,4 % annoncé fin 2016).
Bien évidemment, ce mouvement d'ensemble doit être nuancé selon les métiers et les territoires.
Forte dynamique dans le neuf
Sur le plan national, le neuf tire toujours l'activité vers le haut, à une cadence qui ne faiblit pas.
Ainsi, en rythme annuel sur sept mois, les mises en chantier de logements progressent de 8,9 % et les surfaces commencées de locaux non résidentiels affichent + 2,1 %.
Côté logement, tous les segments participent à cette dynamique, l'individuel (+ 13,4 %) comme le collectif (+ 17,4 %).
Dans le non-résidentiel, le segment des bâtiments industriels et assimilés explique à lui seul le redressement, avec + 8,9 % sur sept mois.
Léger redressement de l'entretien-amélioration
Les informations disponibles laissent entrevoir une activité un peu plus dynamique que prévu de l'entretien-amélioration. De fait, pour la première fois depuis 2011, l'opinion des chefs d'entreprise sur le marché et sur ses perspectives se redresse, y compris chez les artisans.
Les crédits immobiliers accordés pour gros travaux seuls affichent aussi un léger mieux, à + 11,6 % en glissement annuel sur le premier semestre 2017 (souvenons-nous qu'en 2016, ce même semestre était historiquement bas). On reste toutefois bien loin des promesses du Grenelle de l'environnement et de ses suites.
Un segment s'avère clairement à la peine : celui du locatif privé, où les travaux entre deux locations descendent dans l'abîme depuis 2014. Ils ne concernent aujourd'hui plus qu'un logement sur sept et, faute d'entretien, le parc vieillit.
L'emploi se ressaisit
Classiquement, l'emploi suit le redressement de l'activité avec retard. Mais l'accélération s'avère nette, près de 15 900 postes ayant été créés (intérim compris) au premier semestre 2017, par rapport à la même période un an plus tôt.
Et tout laisse à penser que les 10 000 postes supplémentaires (intérim compris), initialement prévus par la FFB, seront dépassés.
L'appareil de production sort de l'ornière
La situation des entreprises s'améliore graduellement, à mesure que les carnets de commandes se regarnissent et que les prix sortent des niveaux trop bas qu'ils affichaient depuis l'entrée en crise.
Les défaillances reculent toujours, à 14,4 % en glissement annuel sur les cinq premiers mois de l'année d'après la Banque de France.
Les créations (hors micro-entreprises) progressent, quant à elles, de 4,5 % en glissement annuel sur sept mois à fin juillet 2017.
Les trésoreries ont cessé de se dégrader et les marges devraient bénéficier d'une concurrence moins violente entre entreprises.
... mais de lourdes menaces à l'horizon
Tout irait pour le mieux si quelques signes avant-coureurs d'inflexion ne se manifestaient déjà.
Cette tendance pourrait même se transformer en retournement, si les projets gouvernementaux devaient être confirmés.
Une amorce de décrochage dans le neuf...
La situation immédiate très positive dans le neuf ne saurait masquer un décrochage des ventes de logements au deuxième trimestre, dans l'individuel (- 1,9 % sur un an) comme dans le collectif (- 9,4 %). Fort logiquement, le nombre et la production de crédits immobiliers baissent sur la même période.
Côté non-résidentiel, l'inquiétude tient principalement à l'effondrement du taux de réalisation des budgets des collectivités locales pour les travaux de bâtiment (65 % entre 2009 et 2015, 59 % en 2016).
Rien n'assure donc que la reprise côté bâtiments administratifs aura lieu.
... qui pourrait s'accentuer compte tenu des annonces du gouvernement
Plusieurs prises de parole officielles dénotent un changement de ton à l'égard de l'immobilier :
- impôt sur la fortune immobilière (IFI) qui, portant aussi sur le locatif privé, constitue une nouvelle négation du rôle économique des investisseurs ;
- énième jalon sur le chemin de la disparition de l'épargne logement ;
- dénaturation du dispositif Pinel ou du PTZ, avec la suppression de l'éligibilité des zones B2 et C pour le premier, de la zone C pour le second, assortie d'un recalibrage en B2. Pour mémoire, le rognage du PTZ+ fin 2012 (notamment dans les zones B2 et C) et la transformation du dispositif Scellier en Duflot - alors que les commandes commençaient à faiblir - ont ravagé le marché jusqu'en 2014, puis conduit à des mesures correctrices.
Réitérer une telle erreur sera plus particulièrement pénalisant pour le marché de la maison individuelle neuve et pour l'emploi.
Il faut ajouter le rabotage du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), au moment où le segment de l'entretien-amélioration commence tout juste à se ressaisir.
Et enfin, le nouvel effort demandé aux collectivités locales et son impact sur l'investissement public dans le bâtiment.
Certes, tout aussi officiellement, le plan logement dévoilé le 20 septembre par le gouvernement prévoit des mesures structurelles permettant d'abaisser les prix de production. Mais les contours précis de ces mesures manquent encore, et personne ne peut croire que leurs impacts de moyen terme compensent les effets immédiats d'une révision trop brutale des aides.
« Dans un marché qui s'infléchit déjà, il importe de ne pas jouer aux apprentis sorciers.
La reprise de l'emploi dans le secteur ne survivrait pas à une potion trop amère?!
Et il convient de rappeler un point fondamental de notre économie : l'importance des dispositifs de soutien au logement procède, avant tout, d'une fiscalité trop pesante. Cet obstacle doit être arasé et le stock de normes s'appliquant au bâtiment élagué, avant que l'on puisse s'attaquer sans risque avéré aux dispositifs de soutien. »
Jacques Chanut, Président de la FFB