En juin, le gouvernement vous a chargé d’une mission pour tenter d’atténuer les effets de la crise des matériaux, qui prenait une tournure inquiétante pour le BTP. Pouvez-vous nous dire un mot plus précis sur la manière dont vous organisez cette mission ?
Effectivement, les ministres de l’Économie, des Finances et de la Relance, du Logement et des PME m’ont demandé de mettre en place deux outils clés, un comité de crise et une médiation de filière qui associent tous les acteurs : industriels, transformateurs, distributeurs, entreprises de travaux et maîtres d’ouvrage.
Le comité de crise a pour vocation de faire remonter, par l’intermédiaire de ses membres, dont la FFB fait évidemment partie, les noms des acteurs structurants de la filière ayant des comportements « non solidaires » et mettant en difficulté avérée des entreprises ou des chantiers.
Son rôle est d’agir vite en appelant directement les dirigeants de ces entreprises ou entités publiques et en leur demandant de changer de comportement.
Quant à la médiation de filière, son rôle consiste à identifier les pratiques permettant d’améliorer les relations entre acteurs à moyen terme.
Un médiateur national dédié, Claude Bordier, a été nommé pour coordonner les échanges. Au courant de l’été, il a auditionné l’ensemble des organisations représentées pour recueillir leurs attentes et propositions.
La réflexion globale a été lancée le 5 octobre. Des groupes de travail sont constitués pour approfondir trois volets : le besoin d’outils d’amélioration de la visibilité de l’approvisionnement en matières premières, les outils d’objectivation des coûts et les bonnes pratiques contractuelles et commerciales.
Quatre mois se sont écoulés depuis juin. Quel premier bilan tirez-vous de l’exercice ?
La mise en place du comité de crise ainsi que la communication qui en a été faite par les organisations professionnelles ont permis de modifier, dans un sens favorable, certains comportements anormaux.
Des pratiques vertueuses ont également été identifiées, comme par exemple la renonciation aux pénalités de retard en cas de difficulté d’approvisionnement.
Aujourd’hui, nous sentons une prise de conscience collective, ce qui est une très bonne nouvelle. Cependant, nous devons rester vigilants.
La mobilisation de tous les acteurs de la filière est encore nécessaire, afin de faire remonter les informations relatives à des comportements « non solidaires » et de bonnes pratiques qui pourront être partagées et valorisées.
Y a-t-il une articulation prévue entre cette mission nationale et l’action de la médiation sur le territoire ? Une entreprise peut-elle saisir son médiateur local pour un problème relatif à cette crise des matériaux avec un fournisseur ou un donneur d’ordre ? Le cas échéant, comment ?
Pour toute difficulté d’exécution d’un marché ou d’un contrat particulier, il est évidemment possible de saisir le Médiateur des entreprises, qui dispose d’un réseau sur l’ensemble du territoire.
Je rappelle que ce dispositif est gratuit et confidentiel.
Il suffit de se rendre sur mediateur-des- entreprises.fr et de valider sa demande. Elle enclenche la confidentialité de la procédure et nous permet d’intervenir rapidement.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la suite de votre mission, notamment sur la médiation de filière qui vient d’être engagée ?
Cette réflexion collective engagée au sein de la filière constitue le deuxième étage de la fusée. Elle devrait conduire à l’élaboration d’un guide ou d’une charte de bonnes pratiques, qui seront ainsi clairement définies et sur lesquelles l’ensemble de la filière pourra se positionner.
Évidemment, ses travaux prendront un certain temps. La difficulté sera d’abord de faire ressortir les bonnes pratiques, mais aussi, et surtout, de faire en sorte qu’elles soient soutenues par tous – industriels, distributeurs, entreprises de travaux, clients, dans un climat de confiance.
Il est important que toute la filière s’engage sur un socle de bonnes pratiques communes qui sera profitable pour tous, alors que les perspectives d’activité sont bonnes.