La prévention du risque électrique est un thème central de la nouvelle convention que s'apprêtent à signer Enedis et la FFB. Comment abordez-vous ce risque ?
Il est de notre responsabilité comme de celle de la FFB de s'atteler à ce sujet en permanence car ce qui est en jeu, c'est l'intégrité physique de nos salariés et de ceux des entreprises qui interviennent sur les installations électriques. La prévention nécessite un effort constant d'information et de sensibilisation, en insistant en particulier sur l'importance des comportements pour prévenir les situations à risque. C'est dans cet esprit que nous renforçons nos liens de proximité avec la FFB, pour aller à la rencontre des entreprises au plus près du terrain1.
Comment améliorer les processus de déclaration de travaux à proximité des réseaux et de raccordement provisoire des chantiers ?
Il faut d'abord souligner que c'est précisément pour assurer une meilleure prévention des risques qu'a été instaurée la réglementation DT-DICT2 et l'obligation de déclarer les travaux à proximité des réseaux. Ces dernières années, nous avons consacré d'importants efforts à la numérisation de la cartographie de nos réseaux afin que les DT-DICT apportent des réponses rapides et précises aux entreprises, ce qui est essentiel pour leurs interventions. Ce travail sera poursuivi et enrichi. Pour autant, les raccordements, qu'ils soient provisoires lors du chantier ou définitifs à l'issue des travaux, sont des processus par définition complexes, car ils font intervenir de nombreux interlocuteurs, dont Enedis. Nous travaillons dans le sens de leur simplification, et le digital peut largement y contribuer. Nous devons aussi poursuivre ensemble, comme le prévoit la convention Enedis-FFB, nos actions communes pour informer les entreprises - une sur deux, par exemple, croit encore qu'un raccordement s'obtient en s'adressant à Enedis alors que c'est auprès du fournisseur d'énergie.
Il peut subsister toutefois des situations bloquantes. Comment y remédier ?
En règle générale, quand le processus est bien engagé, il se termine bien. En revanche, un petit caillou dans le système, souvent lié au fait que l'initialisation du processus de raccordement ne s'est pas faite avec les bonnes informations ou dans le bon timing, peut effectivement créer des situations bloquantes. Nous sommes en train de mettre en place un dispositif qui permettra aux entreprises d'avoir un point d'entrée unique chez Enedis en cas de difficulté, avec un interlocuteur dans le territoire concerné. C'est en renforçant les relations de proximité que l'on facilitera la résolution des problèmes, en particulier lorsqu'il faut faire intervenir d'autres acteurs comme les collectivités.
En tant que gestionnaire du réseau de distribution d'électricité français, quel est votre rôle dans la transition énergétique ?
Il est central - pour Enedis comme d'ailleurs pour les entreprises du bâtiment. La nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), qui est en cours de finalisation, va donner pour les dix prochaines années une impulsion sans précédent à la politique énergétique de la France, en particulier dans trois domaines : l'efficacité énergétique des bâtiments, avec l'objectif de rénover massivement le parc existant ; la forte progression des énergies renouvelables, principalement le photovoltaïque, qui devraient représenter 27 % de l'énergie finale consommée en 2023 ; le développement de la mobilité électrique, pour laquelle il faudra déployer à grande échelle des bornes de recharge dans les espaces publics mais aussi les bâtiments d'habitation, les immeubles collectifs, etc. C'est dans les territoires que se réalisera la transition énergétique, et les grands acteurs de proximité que sont Enedis et le secteur du bâtiment sont tous deux directement concernés, avec tous les équipements qu'il s'agira d'installer et de raccorder au réseau, ouvrant ainsi tout un espace de coopération.
Comment Enedis s'adapte-t-il en particulier à la montée en puissance du photovoltaïque ?
C'est effectivement un sujet essentiel. Historiquement, notre réseau s'est organisé autour d'une production d'énergie centralisée. Aujourd'hui, avec l'essor du photovoltaïque, il y a déjà en France 400 000 producteurs qui envoient de l'énergie sur le réseau, et ce nombre est en constante progression. C'est pour Enedis un enjeu majeur, non seulement en termes de raccordement - 90 % des nouvelles demandes individuelles de raccordement incluent des installations photovoltaïques - mais aussi de qualité globale de la distribution d'électricité. Notre rôle est désormais de gérer en quasi-temps réel le nouvel équilibre entre charge et consommation sur le réseau, en garantissant l'intégration de toutes ces sources d'énergie et la qualité de celle délivrée au client final. Nous vivons une véritable transformation industrielle de nos métiers. Elle est rendue possible par le déploiement de systèmes intelligents à tous les étages du réseau, où circulent de multiples flux de données.
Quel est le rôle du compteur Linky dans ce déploiement d'un réseau de distribution intelligent ?
Son rôle est primordial, car ce sont les compteurs Linky qui fournissent les données massives permettant à la fois à Enedis de réguler la distribution et à l'utilisateur de piloter ses consommations. Via les 21 millions de compteurs Linky déjà installés, soit environ 60 % du parc, près de 3 milliards de données sont échangées chaque jour. Pour les installations photovoltaïques, par exemple, Linky assure le double comptage de l'électricité soutirée et injectée sur le réseau. Plus généralement, c'est un outil essentiel au service de la performance énergétique. Grâce à lui, chacun peut devenir acteur de sa consommation et de sa facture finale. Linky contribue aussi à faire évoluer le métier d'électricien : une nouvelle relation au client s'ouvre par la capacité à mesurer une courbe de charge, à analyser l'empreinte énergétique d'un bâtiment et donc à anticiper et prioriser les travaux de rénovation thermique. Dès à présent, Enedis peut mettre toutes les fonctionnalités opérées par le compteur Linky au service des particuliers comme des bailleurs, des promoteurs, des collectivités, pour améliorer leur efficacité énergétique.
1 Lire aussi l'article « Prévenir le
risque électrique et assurer le raccordement de chantier » dans ce même numéro.
2 DT : déclaration de projet de travaux, incombant au maître d'ouvrage responsable du projet ;
DICT : déclaration d'intention de commencement de travaux, qui relève de l'entreprise.
