Né dans les années 1970, inventé par le géant de l’automobile Toyota, le lean management – de l’anglais lean qui signifie « maigre », « sans gras » ou « dégraissé » – est une démarche d’optimisation de la production qui s’est étendue au monde entier en quelques décennies. Elle repose sur un ensemble de principes comme la recherche de la performance en matière de productivité, de qualité, de délais et de coûts, et par la lutte contre le gaspillage qui se traduit de diverses manières, notamment en agissant sur les temps d’attente, les stocks et les mouvements inutiles, ou les corrections apportées à l’objet fabriqué.
Un besoin de formation au lean management en augmentation
En France, le secteur du bâtiment s'intéresse à la méthodologie lean depuis quelques années seulement – moins de dix ans. Mais les initiatives se multiplient à la FFB pour mettre à profit ces principes au sein des entreprises et sur les chantiers. Si la méthode est encore mal connue et peu répandue, la demande en formation est en augmentation, et les premiers chantiers réalisés en incluant cette démarche commencent à livrer leurs enseignements.
Lean entreprise : une méthode collaborative
La démarche peut tout d’abord être appliquée dans l’entreprise, dans le cadre de ce qu’on appelle le « lean entreprise ». À la tête du groupe Geceha, qui emploie une soixantaine de salariés à Boissy-Saint-Léger (Val-de-Marne) et réunit tous les métiers du génie climatique grâce à ses filiales d’installation, de maintenance et de fabrication, Stéphane Sajoux a été l’un des premiers à suivre une formation dans ce domaine, dispensée par la FFB Île-de-France Est.
Il s’en félicite aujourd’hui. « Comme tous les termes abstraits et venus d’ailleurs, le lean a tendance à inquiéter les entrepreneurs, alors qu’il est avant tout fondé sur le bon sens et qu’il repose sur des principes tout à fait concrets, explique-t-il. Pour ma part, je mettrais en avant la chasse au gaspillage, l’industrialisation des tâches et la planification collaborative. »
Lutter contre le gaspillage, c’est d’abord bien gérer les matériaux, et réduire au maximum les pertes de temps. Pour y parvenir, la méthode met l’accent sur la fameuse règle des « 5 S », à savoir cinq mots de japonais commençant par un « s » et signifiant trier, ranger, nettoyer, standardiser et améliorer en continu.
Une solution d'industrialisation pour le bâtiment
Dans l’entreprise, mettre en œuvre ces règles est simple et apporte des progrès immédiats : si on range, alors on trouve tout de suite les bons matériaux et matériels, on voit immédiatement l’état des stocks, ce qui manque et doit être commandé… et c’est un premier pas pour mettre de l’ordre dans les esprits !
En second lieu, on a tout à gagner à industrialiser des tâches qui se répètent : « Il y a des points communs entre l’industrie et le bâtiment, argumente le chef d’entreprise. Dans l’industrie, la production se déplace devant les ouvriers, tandis que dans le bâtiment, ce sont les compagnons qui se déplacent devant la production, mais des tâches peuvent être industrialisées dans les deux cas. »
Lean construction : exemple concret
À titre d’exemple, Geceha a mis au point un chariot qui peut transporter 25 à 30 m de gaines et passer par une porte, avec un support éclairé pour le plan d’exécution, ce qui permet d’équiper les plafonds à l’avancement, en respectant mieux le matériau et sans multiplier les allers-retours jusqu’au stock pour quelques mètres de gaines à chaque fois. « Avec ce procédé simple, on gagne du temps, de la qualité et du confort de travail ! » résume-t-il.
Le troisième principe, celui de la planification collaborative, est tout aussi concret : il consiste à établir chaque semaine, avec l’ensemble des équipes, un planning comportant toutes les tâches à exécuter par les gens de terrain, les fournisseurs et les partenaires, affichées grâce à des post-it de couleur qui sont positionnés jour par jour et retirés à l’avancement des chantiers.
Pour Stéphane Sajoux, toutes ces mesures ont pour but d’atteindre trois objectifs : la qualité, qui est améliorée par le fait que tout est planifié en amont, avec l’idée de « construire bien » du premier coup, ce qui se mesure facilement au recul des réserves à la livraison ; en second lieu, la rentabilité, puisqu’on réduit le volume des travaux correctifs liés aux non-conformités et qu’on améliore les processus par l’industrialisation ; enfin, le respect des délais, qui découle des deux premiers paramètres.
« Grâce au lean, nos ouvrages sont mieux conçus en amont, nous obtenons une meilleure qualité, plus vite, et nous avons besoin de moins de compagnons sur le chantier », résume-t-il.
Stéphane Sajoux, directeur du groupe Geceha à Boissy-Saint-Léger (Val-de-Marne)
« Le lean a tendance à inquiéter les entrepreneurs, alors qu’il est avant tout fondé sur le bon sens et qu’il repose sur des principes tout à fait concrets. »
Le lean : de l’entreprise au chantier
Les entreprises du bâtiment peuvent aussi adopter cette démarche en commençant par le chantier, dans le cadre du lean chantier. Tel est le cas de l’entreprise de maçonnerie et gros œuvre Malandain, qui emploie une vingtaine de salariés à Saint-Jean-d’Illac (Gironde). Son premier contact avec le lean est intervenu dans le cadre d’un projet de 23 logements, réalisés par le bailleur social Gironde Habitat à Martignassur- Jalle, près de Bordeaux, accompagné par la FFB Gironde et un cabinet de management en ligne, et soutenu par l’opérateur de compétences Constructys. Pour ce projet pilote qui a démarré en juin 2019, le maître d’ouvrage a procédé à un appel d’offres en lots séparés, où toutes les entreprises devaient fonctionner en lean.
Pour son dirigeant Emmanuel Malandain, c’est une découverte et presque une révélation : « Ce qui est remarquable, c’est que le lean chantier ne révolutionne rien du tout. Il met le doigt sur les points critiques de notre activité, que l’emballement général des chantiers nous avait fait perdre de vue, et nous amène à les examiner pour y apporter des solutions d’amélioration. »
Lean construction : définition
La première traduction du lean chantier est la réalisation d’un planning collaboratif, ou last planner system (LPS), révisé chaque semaine, dans lequel chaque entreprise indique au plus juste les durées nécessaires à la réalisation des ouvrages, en respectant l’ordre d’intervention de chaque corps d’état, toujours au moyen de post-it de couleur.
Avec une conséquence majeure : on ne prévoit plus les jours supplémentaires qu’on prenait pour intégrer les aléas, ce qui réduit mécaniquement les délais de chantier, d’autant que, si une entreprise entrevoit une difficulté à tenir ses engagements, elle en informe au plus vite ses partenaires pour trouver une solution.
Le second pilier de la démarche est le balisage des zones de stockage et le fléchage des circulations, en mettant en place un « plan d’installation dynamique du chantier » pour garantir une gestion ordonnée des matériaux et une fluidité des déplacements des compagnons. Troisième point, qui découle des deux premiers : le chantier est décomposé en opérations successives, et il est découpé en zones (dix, par exemple, pour le chantier de Martignas-sur-Jalle), ce qui permet de lutter efficacement contre les temps morts.
Gestion de chantiers collaborative bâtiment
Comment ? « Par exemple, au lieu d’attendre que le gros œuvre soit terminé sur tout un étage de huit appartements avant de faire venir le plâtrier, l’étage est divisé en zones, ce qui permet au plâtrier d’intervenir plus tôt, par tranches de deux appartements, en mobilisant moins de compagnons », explique Emmanuel Malandain. Le chef d’entreprise insiste surtout sur les progrès du lean en termes de communication : « Bien souvent, sur les chantiers, les entreprises ne se parlent plus, et chacun a pris l’habitude de faire son travail dans son coin.
Grâce au planning collaboratif, le dialogue reprend, le maçon sait quand l’électricien doit incorporer et prend ses dispositions pour couler son béton juste après.On prend du temps en amont pour tout planifier en détail, mais après, les réunions de chantier servent à l’ajustement et durent une demi-heure au lieu d’une demi-journée. »
Emmanuel Malandain, directeur de l’entreprise Malandain à Saint-Jean-d’Illac (Gironde).
« Le lean chantier met le doigt sur les points critiques de notre activité, que l’emballement général des chantiers nous avait fait perdre de vue. »
L’UMB-FFB élabore un outil d’organisation
qui applique les principes du lean
Comment amener les entreprises à améliorer leur organisation ? Tel est l’objectif qui a guidé l’Union des métiers du bois (UMB-FFB) dans l’élaboration d’un référentiel d’organisation qui s’applique dans un premier temps aux entreprises de charpente et de menuiserie. Issu d’un audit d’une dizaine d’entreprises des métiers du bois, et de l’expertise de l’UMB-FFB, cet outil appelé « Charpentier-menuisier 8.0 » répertorie des centaines de tâches réalisées par l’entreprise, réunies en huit grands chapitres – management, communication interne et externe, investissements, veille et innovation, gestion de l’informatique, organisation atelier et chantier – en indiquant pour chacune d’elles les process correspondants, le savoir-faire et le savoir-être à adopter, et en renvoyant aux nombreux outils de la FFB disponibles pour les mener à bien.
Existant pour l’instant sous forme papier, il définit ainsi une organisation type idéale et invite les entreprises à s’en rapprocher, en faisant la chasse aux coûts de non-qualité, aux procédures inutiles, au temps perdu, pour améliorer leur efficacité et leur rentabilité, rejoignant ainsi les principes du lean. Étant donné qu’il prend en compte toutes les tâches qui relèvent du bureau d’études, de l’atelier, du magasin et du chantier, « Charpentiermenuisier 8.0 » recouvre les problématiques de l’ensemble des entreprises du secteur, et a vocation à être édité sous forme numérique et étendu à tous les métiers du bâtiment.
En savoir plus
UMB-FFB (Union des métiers du bois), tél. : 01 40 69 57 40
Vers une responsabilisation « horizontale » avec le lean management
Enfin, une telle démarche est aussi un progrès sur le plan humain. En effet, le lean chantier transfère les responsabilités, habituellement concentrées par les conducteurs de travaux, vers toutes les forces vives, des chefs de chantier aux chefs d’équipe et aux compagnons, dont les propositions sont écoutées et même sollicitées pour améliorer l’ergonomie de leur poste de travail. Il en résulte une responsabilisation « horizontale », qui valorise le rôle de chacun dans la réalisation du projet.
Pour Emmanuel Malandain, le bilan de ce premier chantier lean est plus que positif : « J’estime que mon entreprise a économisé 2,5 % sur les aciers, grâce à un logiciel d’optimisation de la découpe, 8 % sur le temps de location de matériel, 11 % sur les objectifs de main-d’œuvre, avec comme résultat un gain de marge de 7 % par rapport à un chantier conventionnel. Sur le plan humain, toutes mes équipes sont valorisées et remotivées pour de nouveaux objectifs. »
Pas étonnant que, de façon générale, les entreprises qui font du lean chantier jugent préférable que toutes les entreprises du chantier fonctionnent déjà individuellement en lean.
Le lean dans le batiment : un outil d'audit et de prévention
Yves Chassagne, OPPBTP
Le lean est aussi un levier de prévention sur le chantier : « Cette démarche implique une meilleure préparation, un chantier plus propre, et permet de façon globale de réduire l’écart entre ce qui est prescrit et ce qui est réellement réalisé sur le chantier », argumente Yves Chassagne, responsable d’opération méthodes constructives à l’OPPBTP, qui est partenaire de la FFB sur ses chantiers pilotes réalisés en lean2.
« Avec une telle approche, on réduit la part d’improvisation sur le chantier, le fait de s’affranchir des règles en vigueur et donc de s’exposer à des risques. » Le préventeur ajoute que, selon les statistiques dont on dispose, une grande partie des accidents du travail est imputable à des problèmes de flux non maîtrisés, qu’il s’agisse de chutes lors de travaux en hauteur, d’écrasement par des engins de chantier ou de manutention inadaptée de matériaux trop lourds.
Or le lean prend en compte ces différents aspects : le « plan d’installation dynamique du chantier » ne fait pas autre chose que de délimiter précisément les zones et les modes de stockage, et de séparer par un marquage au sol les circulations dédiées aux engins et celles dédiées aux compagnons, sans que celles-ci se croisent. Avec de telles mesures, les compagnons ne sont plus gênés dans leur progression et ne rencontrent pas d’obstacles susceptibles de provoquer des accidents.
Autre exemple, la bonne organisation du stockage et la mutualisation des livraisons, depuis l’arrivée du camion jusqu’à l’utilisation de l’ascenseur de chantier, peuvent aussi réduire de manière significative les manutentions et les distances parcourues par jour, pour une meilleure prévention des troubles musculo-squelettiques.
« En définitive, le lean change radicalement la prévention sécurité sur le chantier, car les mesures ne sont plus imposées de l’extérieur par des contrôles, mais deviennent partie intégrante du professionnalisme des compagnons », se félicite Yves Chassagne. En toute logique, il n’y a pas de « responsable lean » comme il peut y avoir un responsable sécurité chargé des contrôles, puisque la prévention est désormais partagée et portée par tous les acteurs du chantier.
Reste maintenant à définir des indicateurs fiables et massifs pour pouvoir mesurer efficacement les gains apportés par le lean dans ce domaine.
« Un planning pour anticiper les tâches à réaliser », Dominique Rioual, Le Teuff Électricité
Obtenir une meilleure coordination entre l’entreprise et le chantier : voilà ce que Dominique Rioual, conducteur de travaux chez Le Teuff Électricité, qui emploie 32 salariés à Lanester (Morbihan), attendait du lean. Après une formation-action sur le sujet, proposée par la FFB Bretagne, il est à l’origine de changements importants dans son entreprise : auparavant, les chefs d’équipe indiquaient chaque matin à leurs hommes les travaux à réaliser, sans vision sur l’ensemble du chantier ; avec le lean, un planning est établi avec les tâches à réaliser sur les quatre semaines à venir. Résultat : l’entreprise a toutes les remontées d’information pour préparer les opérations, commander les consommables ou louer les matériels à l’avance.
« Avant le lean, il n’était pas rare de devoir revenir sur le chantier pour reprendre une partie de l’installation, et nous avions souvent des phases de reprise de béton décalées dans le temps, explique-t-il. Aujourd’hui, tout est mieux préparé et souvent bien réalisé du premier coup, avec des délais beaucoup mieux respectés et sans stress. Un vrai progrès. »
Jérôme Cohade, dirigeant de Plebac à Mérignac (Gironde).
« Le lean est d’abord d’un outil pour nous interroger sur nos façons de faire et pour améliorer le bien-être de chacun à son poste. »
Un axe de progrès continu avec la démarche lean
Le lean est donc une méthode qui concerne tous les aspects de l’entreprise, dans laquelle chacun peut prendre ce qui l’intéresse, commencer par un thème, puis l’étendre de façon progressive à l’ensemble de l’activité, débuter en interne ou se lancer directement sur le chantier… Dirigeant de Plebac, une entreprise spécialisée dans les bardages métalliques et l’étanchéité des toitures- terrasses implantée à Mérignac (Gironde), Jérôme Cohade a utilisé ces préceptes pour améliorer la gestion de ses dossiers et de sa relation clients, autrement dit le volet administratif de son activité (on parle alors de lean management).
L’entreprise a dédié une salle au planning, où le suivi des opérations à l’aide de post-it fait apparaître chaque étape successive, depuis le devis jusqu’au bureau d’études, des besoins des conducteurs de travaux reliés au service achats jusqu’à la fin de vie du chantier et à la levée des réserves avec le client. « Cette méthode nous a permis de gagner en fluidité, de ne plus perdre de temps et d’anticiper les problèmes qui peuvent surgir, explique-t-il. Nous avons une colonne pour identifier les points bloquants et trouver des solutions. De fait, le niveau de stress de nos équipes a fortement baissé. »
En tant que président de la commission Innovation de la Fédération de la Nouvelle-Aquitaine, il est aussi l’un des promoteurs du lean chantier dans l’ensemble de la région. Il y voit un levier puissant pour faire progresser les pratiques vertueuses et les conditions de travail1. « On parle du lean comme d’un moyen de gagner en rentabilité, ce qui est juste, argumente-t-il, mais ce n’est qu’une de ses retombées. Il s’agit d’abord d’un outil pour nous interroger sur nos façons de faire et pour améliorer le bien-être de chacun à son poste, en donnant la parole aux gens de terrain qui ont souvent des idées à faire valoir. Les gains en qualité, en respect des délais et en productivité sont les conséquences de cette philosophie. »
Pour aller plus loin, Jérôme Cohade a convaincu des maîtres d’ouvrage d’inclure le lean à leurs dossiers de consultation des entreprises, sur des chantiers pilotes visant à tester sa pertinence, tout en permettant à des entreprises adhérentes de se lancer dans le lean chantier. Avec des résultats plus que prometteurs, puisque les 11 chantiers réalisés à ce jour font état d’une réduction de leurs réserves de 50 à 75 %.
« Les maîtres d’ouvrage sont confrontés aux mêmes problèmes que les entreprises : difficulté à respecter les délais, complexité de la construction liée à l’empilement des réglementations successives, conduisant à multiplier les intervenants de plus en plus spécialisés qu’il faut faire travailler harmonieusement ensemble, ajoute Jérôme Cohade.
Ces projets expérimentaux montrent que le lean chantier est aussi une solution pour eux. » Comme un signe des temps, les règles du lean – la division du chantier par zones qui répartit les compagnons, l’établissement d’un sens de circulation pour les engins et les compagnons, la réduction des allers-retours inutiles, etc. – rejoignent les recommandations émises par l’OPPBTP pour maintenir une distanciation sociale et éviter la propagation du Covid-19 sur les chantiers.
Tandis que les entreprises doivent s’organiser pour retrouver de la sérénité et faire face aux temps difficiles qui succèdent à la pandémie, le moment semble venu de s’approprier cette nouvelle approche de la construction pour faire profiter l’ensemble du bâtiment de ce souffle de renouveau.
Lean : un outil pour rebondir
, Paul Hubert, Hubert Peinture
Il n’est pas excessif de dire qu’Hubert Peinture, qui emploie 26 salariés à Amfreville-la-Mi-Voie (Seine-Maritime), doit en partie son salut au lean. En 2018, suite à de grosses difficultés qui se sont enchaînées depuis la crise financière de 2008, cette entreprise centenaire dépose le bilan.
Son dirigeant, Paul Hubert, décide alors de la restructurer en s’appuyant sur les principes du lean. « Sur la base d’un audit réalisé par un consultant extérieur, nous avons tout remis à plat et identifié un certain nombre de points critiques à améliorer pour gagner en efficacité, en fluidité, en performance », raconte-t-il.
Il s’ensuit un ensemble de mesures, dont le rangement et la réorganisation de l’atelier et du stock, l’organisation de réunions « sauvetage » pour coordonner les actions, la mise en place d’une maintenance préventive pour les matériels d’application, jusqu’à la création d’un compte WhatsApp commun pour que tous les salariés puissent communiquer…
« Pour un investissement en temps limité, nous avons progressé dans tous les domaines, et retrouvé notre chiffre d’affaires antérieur avec neuf salariés en moins, conclut Paul Hubert. Ce sont des choses évidentes qu’il aurait fallu faire bien avant. »
D’un management “commande-contrôle” à un management “autonomie et accompagnement”
Philippe Benquet, Acorus
Dirigeant d’Acorus, Philippe Benquet a utilisé les principes du lean pour organiser la forte croissance de son entreprise, qui emploie aujourd’hui près de 1 000 salariés dans presque tous les métiers du bâtiment et dans toute la France, pour offrir un service global de rénovation, à destination notamment des propriétaires qui souhaitent remettre à neuf leur logement au moment de changer de locataire.
« Dans le bâtiment, le chantier repose surtout sur les épaules du conducteur de travaux, qui distribue toutes les tâches et contrôle leur exécution, ce qui est beaucoup pour un seul homme et peut générer des dysfonctionnements, du stress et beaucoup de non-qualité », explique-t-il. Pour y remédier, l’approche d’Acorus, conformément au lean, a consisté à responsabiliser les compagnons, réunis en microentreprises locales, qui organisent désormais eux-mêmes leurs journées de travail, tout en faisant appel à leur hiérarchie en cas de besoin.
Ce passage d’un management « commande-contrôle » à un management « autonomie et accompagnement » a porté ses fruits, puisque Acorus a réduit le temps d’un chantier de rénovation – quatre à cinq semaines – de 20 %, et atteint un taux de réserves extrêmement bas, proche de celui de l’industrie dont est originaire le lean.
Donner une bouffée d’oxygène à l’entreprise
Stéphane Clerc, Élite Construction
C’est une certaine saturation qui a amené Stéphane Clerc, dirigeant d’Élite Construction, une entreprise de gros œuvre qui emploie une dizaine de salariés à Dijon (Côte-d’Or), à s’intéresser au lean. « Nous en avons eu assez de subir nos chantiers, d’avoir des clients mécontents pour des délais non respectés, et des tensions à l’intérieur des équipes », raconte-t-il.
Pour cesser de courir après le temps, le chef d’entreprise se documente, participe à un atelier de l’UMGO-FFB sur le sujet et s’inspire de la visite d’une entreprise déjà passée au lean pour mettre en œuvre des solutions : rangement et organisation du dépôt, suppression du stock, livraisons à un rythme hebdomadaire permettent de gagner en efficacité, tandis qu’un planning de charges mensuel, avec toutes les dates de début et de fin de chantier, est décliné à la semaine avec les tâches à réaliser chaque jour par chaque équipe.
« Au lieu de dire toujours oui au client et de trouver des solutions a posteriori en nous surchargeant de travail, je peux désormais lui dire ce qui est possible ou pas, et nous commençons et finissons les chantiers comme prévu », se félicite l’entrepreneur.
1 - Grâce à ces mesures, les salariés sont plus sereins et l’entreprise a gagné en rentabilité, puisqu’elle effectue plus de chantiers avec moins de salariés, et moins d’heures supplémentaires.
2 - La FFB Nouvelle-Aquitaine a publié un livre blanc sur le sujet.
Un guide de l’OPPBTP sur le lean est à paraître à l’automne 2020.