Redonner tout son lustre au centre thermal créé en 1911 par l’architecte Louis Lanternier : tel est le propos de Grand Nancy Thermal, actuellement en construction dans la cité lorraine. Pour comprendre les enjeux de ce vaste chantier, il faut avoir en tête que le projet initial resta inachevé, stoppé par la Première Guerre mondiale. Un siècle plus tard, en 2010, un nouveau forage relance l’intérêt de la source thermale dans une optique thérapeutique. Il n’en fallait pas plus pour que la Métropole du Grand Nancy lance un concours d’architecture afin d’en faire un complexe moderne de prestige dédié à la fois au thermalisme, au bien-être et aux loisirs aquatiques. Le lauréat est désigné en juillet 2018 : il s’agit du cabinet Architectures Anne Démians, avec Chabanne Architecte et Chabanne Ingénierie, tandis que les travaux sont attribués en entreprise générale à Bouygues Bâtiment Nord-Est.
Grand Nancy Thermal sera le plus grand complexe thermal et aqualudique situé en centre-ville d’Europe. Il comportera un espace bien-être, construit autour des thermes historiques, qui comprennent la galerie nord, le pavillon de la Source et la piscine ronde, un ensemble inscrit au titre des monuments historiques en novembre 2020. Un bâtiment neuf, construit en extension du bâtiment ancien, accueillera la partie thermale proprement dite, avec un grand bassin de natation en rez-de-chaussée et 76 chambres de standing sur deux étages, pour loger les curistes de longue durée. Il comprendra aussi un restaurant, un bar, une boutique, une salle de séminaire et des terrasses, qui en feront un lieu vivant et ouvert sur la ville. Le troisième volet du projet est l’espace aqualudique, qui sera composé de la piscine olympique historique réhabilitée et de plusieurs bassins supplémentaires destinés aux sports et activités aquatiques. Enfin, l’ensemble est complété par un parc paysager de 11 000 m2, un véritable poumon vert qui longe la grande galerie historique et relie le complexe au parc Sainte-Marie.
Un triptyque déconstruction, réhabilitation, construction neuve
L’entreprise générale et l’ensemble de ses cotraitants ont dû réaliser de nombreuses interventions, très diverses et souvent délicates. Tout a commencé par une phase de démolition d’ouvrages annexes, sans valeur patrimoniale, qui avaient été accrochés aux structures anciennes. « Toutes les mesures ont été prises, en termes d’étaiement et de confortement, pour ne pas menacer la partie classée, commente Marc Reymann, directeur du projet pour Bouygues Bâtiment Nord-Est. Nous avons même installé des capteurs pour nous assurer de la stabilité des édifices existants. » Sous la supervision d’un architecte en chef des monuments historiques, une réhabilitation minutieuse des bâtiments anciens a été effectuée, avec notamment la restauration des façades et structures béton – colonnes, chapiteaux, pots-à-feu et autres ornements – ainsi que des décors intérieurs de la piscine ronde, de la grande galerie et du pavillon de la Source, en grès émaillé, sans oublier les mosaïques, fontaines et décors peints intérieurs.
En parallèle, un important volet de construction neuve a commencé par la réalisation des fondations profondes et le terrassement sous le bâtiment d’hébergement thermal, pour y créer deux niveaux souterrains de parking, suivi de l’élévation des deux niveaux en superstructure. Sur un site très enclavé, le groupement constructeur a dû relever le défi de l’évacuation des 60 000 m3 de terrassements et de gravats issus des opérations, grâce à une logistique dédiée, et limiter au maximum les nuisances du chantier. Enfin, le projet a mobilisé des savoir-faire liés aux métiers hydrauliques, avec la création de quinze bassins neufs, tous différents, et la réhabilitation des deux piscines historiques, dont on a refait le fond, les parois et l’étanchéité. La piscine ronde, qui a conservé ses garde-corps originels, a été équipée de jets hydromassants pour répondre aux attentes actuelles. « Il s’agit d’un chantier exceptionnel, souligne le patron du projet. Quarante-cinq corps de métiers différents et jusqu’à deux cents ouvriers en pointe, issus en majorité d’entreprises de la région, sont intervenus pour donner une nouvelle vie à ce lieu cher aux Nancéens. »
Dialogue architectural avec le passé
Grand Nancy Thermal est aussi un hommage au pionnier du thermalisme nancéen, Louis Lanternier, puisqu’il fait pendant au geste architectural initial, demeuré inachevé. Pour réaliser l’extension de la façade historique, l’architecte a choisi le béton pierre, habillé sobrement de cadres en aluminium thermolaqué, un matériau cousin qui conserve la tonalité classique de la façade historique faite de colonnades en béton. Véritable signature architecturale du projet, la toiture de l’extension est coiffée d’un dôme en forme d’ogive, réponse contemporaine aux trois dômes de forme plus écrasée qui caractérisent le bâtiment ancien, sans en être un « copié-collé ». Cet ouvrage de plus de 15 mètres de hauteur et pesant 14 tonnes, en charpente bois recouverte d’un complexe isolant thermique et d’une vêture en zinc, a été mis en place au mois de septembre. Il accueillera trois passerelles métalliques pour son entretien et sa maintenance, ainsi qu’un lustre suspendu en polycarbonate.
Sa position à l’aplomb du grand bassin circulaire du centre thermal permettra de créer des jeux de lumière et des reflets qui vont sublimer l’élément dominant du lieu, l’eau.
« Ce projet est d’abord une magnifique aventure collective, conclut Marc Reymann. Si Bouygues Bâtiment a pris en charge le gros œuvre et a été à la baguette, nous n’aurions pas pu le réaliser sans nos partenaires cotraitants, de la restauration patrimoniale au traitement d’eau, de la ventilation à l’étanchéité et jusqu’aux corps d’état de finition, comme le carrelage. » Le chantier a été réalisé « en 100 % BIM », ce qui a permis, entre autres, de préconstruire virtuellement le projet d’extension et de le connecter au bâti existant, de fiabiliser la conception et l’exécution, et de centraliser les dossiers des ouvrages exécutés (DOE). La livraison du projet est programmée à la fin 2022, et le début de l’exploitation en 2023.
