Biodiversité sur le chantier : quelle est la réglementation ?

Protéger la faune et la flore est une préoccupation majeure de notre société. C'est pourquoi toute destruction d'espèce protégée ou de son habitat est formellement interdite. Par ailleurs, aucun rejet illégal ne doit être fait dans le réseau d’eau collectif ou dans le milieu naturel. En outre, certains projets de construction peuvent être soumis à une évaluation environnementale avec étude d’impact. En tant qu’entreprise de travaux, il est important de connaître la réglementation en vigueur et de vous renseigner en amont pour éviter toute sanction ou arrêt de chantier.
10:0228/05/2024
Rédigé par FFB Nationale

Interdiction de détruire des espèces protégées

 

Certaines espèces animales ou végétales sont protégées par la réglementation. Elles sont listées dans différents arrêtés ministériels qui fixent pour chacune d’elles les modalités de protection.

Voir la liste des textes réglementaires répertoriant les espèces protégées sur le site de l’Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN).

 

Important à savoir : la réglementation est la même pour toutes les espèces protégées, qu’il s’agisse d’une espèce emblématique (exemples : faucon pèlerin, cigogne, arbre séculaire…) ou d’une espèce plus discrète (exemples : larves de libellules, mousses végétales, fleur…).

 

Ainsi, pour les espèces animales protégées, il est interdit de :

  • Détruire ou enlever les œufs et les nids ;
  • Mutiler, détruire, capturer des animaux appartenant à ces espèces ;
  • Procéder à la naturalisation de spécimens de ces espèces ;
  • Perturber intentionnellement des animaux, notamment pendant la période de reproduction ;
  • Détendre, vendre, acheter, utiliser, transporter des spécimens morts ou vivants ;
  • Détruire, altérer ou dégrader les habitats, biotopes à préserver non seulement pour eux-mêmes, mais parce qu’ils abritent des espèces protégées.

 

A noter que les habitats de ces espèces protégées peuvent être :

  • des habitats naturels : mares, marécages, marais, haies, bosquets, landes, dunes, pelouses, récifs coralliens, mangroves, ou toutes autres formations naturelles, peu exploitées par l'homme)
  • ou d’autres habitats : bâtiments, ouvrages, mines et carrières dans les conditions définies ci-après, ou tous autres sites bâtis ou artificiels (gravières, terrils, clochers etc.)

 

Pour les espèces végétales protégées, il est interdit de :

  • Détruire, couper, mutiler, arracher, cueillir ou enlever des végétaux de ces espèces, de leurs fructifications ou toute autre forme prise par les végétaux au cours de leur cycle de vie ;
  • Transporter, colporter, utiliser, mettre en vente, vendre ou acheter ces espèces ;
  • Détendre des spécimens prélevés dans le milieu naturel ;
  • Détruire, altérer ou dégrader les habitats naturels qui accueillent ces espèces végétales.

Référence règlementaire : article L. 411-1 et suivants du Code de l’environnement

 

Sanctions encourues (article L. 415-6 du Code de l’environnement) : jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 150 000€ d’amende (en cas destruction « en bande organisée », la sanction peut aller jusqu’à 7 ans d’emprisonnement et 750 000€ d’amende). La perturbation intentionnelle d’une espèce animale protégée constitue une contravention de la 4ème classe relevant du tribunal de police (amende de 750€).

 

 

L’importance de se renseigner en amont

 

Dans tous les cas, il faut être vigilant et se renseigner en amont. Les informations liées aux enjeux écologiques du chantier sont importantes non seulement pour exécuter les travaux, mais également avant de signer le marché, afin de prendre en compte tous les risques et de pouvoir :

  • Intégrer au marché toute prestation qui s’avérerait nécessaire (études, installations de protections autour du chantier etc.) ;
  • ajuster le délai d’exécution aux impératifs de protection ;
  • éviter tout arrêt de chantier non prévu, lié à la découverte d’espèces protégées en cours de travaux.

 

Renseignez-vous sur les études déjà existantes sur le territoire concerné par les travaux, en consultant les acteurs locaux concernés ou en vous référant aux bases de données naturalistes faunistiques et floristiques. La liste des espèces de l’INPN constitue une grande base de données naturaliste, mais il existe également des bases de données spécialisées, comme celle de Faune France spécialisée dans les données faunistiques, ou des bases de données spécifiques à des territoires donnés.

 

Vous pouvez également faire appel au maître d’ouvrage pour vous renseigner sur les enjeux écologiques du chantier, faire appel à la mairie, à une association locale de protection de la nature ou encore à un écologue (notamment dans le cas où l’inventaire écologique avant le chantier est prévu).

 

A noter que lors du dépôt des demandes d’autorisation d’urbanisme, il arrive que certaines communes informent systématiquement les maîtres d’ouvrage de la présence d’espèces protégées sur leur territoire.

 

Un inventaire écologique peut être réalisé, dans le cadre ou non d’une évaluation environnementale (voir ci-après), pour caractériser et étudier la présence ou l’absence d’habitats naturels et d’espèces animales ou végétales présentant des enjeux de conservation ou qui sont protégées au sein de la zone de chantier. Il permet de faire le portrait écologique de la zone en caractérisant les habitats et leur état de conservation et en déterminant les fonctionnalités écologiques du site. Il doit être réalisé selon un protocole particulier, par un spécialiste écologue, aux bonnes périodes du calendrier écologique des espèces recherchées.

 

 

Que faire en cas de présence d’une espèce protégée sur le chantier ?

 

En cas de constatation de la présence d’une espèce protégée sur le chantier ou sur son emprise, des solutions doivent être envisagées avec un expert.

 

Cela peut être selon les cas :

 

  • Une programmation des travaux différée pendant une période d’absence de l’espèce et mise en place éventuelle de mesures de compensation (exemples : intervention en hiver pour ne pas interférer avec la période de reproduction des oiseaux et pose de nichoirs artificiels) ;

 

  • Des mesures d’évitement ou de réduction des impacts des travaux vis à vis de l’espèce sur le chantier (exemples : interdiction d’accès à la zone où se trouve l’espèce, neutralisation des gîtes accueillant ces espèces pour éviter qu’elles ne reviennent pendant la durée des travaux…)

 

Sans solution alternative, une demande de dérogation de destruction d’espèces protégées doit être transmise par le responsable du projet au préfet.

 

Cette demande de dérogation de nuire aux espèces protégées est possible sous réserve de respecter les conditions mentionnées à l’article L411-2  du code de l’environnement :

  • Il n’y a aucune autre solution satisfaisante ayant un moindre impact ;
  • La dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations d’espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle ;
  • Le projet répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d’intérêt public majeur. A titre d’exemple, le décret précise que sont réputés répondre à une raison impérative d'intérêt public majeur, sous conditions, certains projets d'installations de production d'énergies renouvelables ou de stockage d'énergie dans le système électrique

 

Les dérogations sont, en principe, accordées par le préfet qui publiera un arrêté préfectoral précisant les conditions dans lesquelles l’opération pourra être exécutée et les actions à mettre en place sur le chantier (mesures d’évitement, de réduction et/ou de compensation des impacts générés par les travaux). En cas de non-respect, la dérogation peut être révoquée.

 

Le silence gardé pendant plus de quatre mois par l'autorité administrative sur une demande de dérogation vaut décision de rejet (sauf projet entrant dans le champ de l’autorisation environnementale, cette dernière pouvant, sous conditions, valoir dérogation).

 

 

Protection de l’eau et des milieux aquatiques

 

Quelle que soit l’activité sur le chantier, il est impératif d’organiser les travaux de telle sorte qu’aucun rejet illégal ne soit fait dans le réseau d’eau collectif ou dans le milieu naturel, en raison de la protection de l’eau et des milieux aquatiques.

 

Sanctions encourues : mise en demeure administrative (Article L.178-8 et suivants du Code de l’environnement), avec obligation de procéder à des expertises et analyses au frais de l’exploitant/ du propriétaire, ou même réalisation de travaux d’office par l’autorité administrative, des sanctions pénales sont prévues en cas d’infraction.

 

Le fait de jeter, déverser ou laisser s'écouler dans les eaux superficielles, souterraines ou les eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales, directement ou indirectement, une ou des substances quelconques dont l'action ou les réactions entraînent, même provisoirement, des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune, à l'exception des dommages visés aux articles L. 218-73 et L. 432-2, ou des modifications significatives du régime normal d'alimentation en eau ou des limitations d'usage des zones de baignade, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.

 

Le tribunal peut également imposer au condamné de procéder à la restauration du milieu aquatique dans le cadre de la procédure prévue par l'article L. 173-9.

 

Ces mêmes peines et mesures sont applicables au fait de jeter ou abandonner des déchets en quantité importante dans les eaux superficielles ou souterraines ou dans les eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales, sur les plages ou sur les rivages de la mer. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux rejets en mer effectués à partir des navires.

 

Le délai de prescription de l'action publique des délits mentionnés au présent article court à compter de la découverte du dommage.

 

 

Évaluation environnementale

 

 

Quels projets sont concernés ?

 

Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur la santé humaine ou l’environnement font l’objet d’une évaluation environnementale et ce, systématiquement ou bien en fonction de critères et seuils réglementaires ou pour certains projets, après un examen au cas par cas.

 

Les projets soumis à évaluation environnementale ou étude au cas par cas sont listés dans l’annexe à l’article R122-2 du Code de l’environnement.

 

 

A qui incombe l’obligation ?

 

Cette obligation incombe au maître d’ouvrage.

 

Elle comprend :

  • un rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement, dénommé étude d’impact ;
  • la réalisation de consultations publiques ;
  • l’examen, par l’autorité compétente, pour autoriser le projet, de l’ensemble des informations présentées dans l’étude d’impact et reçues dans le cadre des consultation effectuées et du maître d’ouvrage.

 

L’évaluation environnementale permet de décrire et les incidences notables directes et indirectes d’un projet sur les facteurs suivants :

  • La population et la santé humaine
  • La biodiversité (en accordant une attention particulière aux espèces et habitats protégés)
  • Les terres, le sol, l’eau, l’air et le climat
  • Les biens matériels, le patrimoine culturel et le paysage
  • Les interactions entre les facteurs mentionnés précédemment

 

 

L’étude d’impact doit être transmise aux entreprises de travaux

 

L’étude d’impact réalisée dans le cadre de l’évaluation environnementale doit impérativement être transmise aux entreprises de travaux avant la passation des marchés afin de chiffrer, prévoir et mettre en œuvre les solutions d’évitement, de réduction et de compensation des impacts environnementaux les concernant sur le chantier.

 

Cette étude d’impact comprend notamment :

  • les incidences notables probables sur l’environnement ;
  • les mesures envisagées pour éviter ces incidences, réduire celles qui ne peuvent être évitées et compenser celles qui ne peuvent être évitées ni réduites ;
  • des solutions de substitution raisonnables qui ont été examinées par le maître d'ouvrage, en fonction du projet et de ses caractéristiques.

 

Références réglementaires : article L-122 et article R-122 du Code de l'environnement.

 

 

Évaluation des incidences Natura 2000

 

Pour tout projet de travaux situé un site classé Natura 2000, une évaluation des incidences est imposée préalablement à sa réalisation.

 

Cette évaluation est destinée à déterminer si le projet peut avoir un effet significatif sur les habitats et sur les espèces végétales et animales présentes sur le site et à proximité.

 

La réalisation du dossier incombe au maître d’ouvrage. S’il est accepté, des mesures de prise en compte de la biodiversité sont imposées au chantier via un arrêté préfectoral.

 

Les activités soumises à évaluation des incidences Natura 2000 figurent sur des listes, nationale et locales : voir liste consolidée.

 

A noter : lorsqu’un dossier de demande d’urbanisme comporte une étude d'impact, cette étude tient lieu de dossier d'évaluation d’incidences Natura 2000 si elle satisfait aux prescriptions du Code de l’environnement.

 

 

Des prescriptions et réglementations locales

 

Des prescriptions peuvent être imposées par certaines communes notamment dans les règles concernant l’aspect extérieur des bâtiments, dans les orientations d’aménagement et de programmation (OAP) des plans locaux d’urbanisme (PLU), dans les règlements de campagnes de ravalement obligatoires, etc.

 

Quelques exemples :

  • Communauté de communes du Pays Riolais (Haute-Saône) : «en cas de réhabilitation ou d’isolation thermique des bâtiment existants, les travaux sont autorisés sous réserve d’être compatible avec l’écologie des chauves-souris»
  • OAP TVB PLU Nantes Métropole n°30 : «Maintenir les aménagements existants (murs, murets, clôtures…) dès lors qu’ils sont identifiés […] comme support de biodiversité».
  • Toulon et Lyon : des prescriptions de protection de certaines espèces sont incluses dans le règlement des campagnes de ravalement obligatoire.
  • Hyères : information systématique de la présence d’espèces protégées sur le territoire lors d’une demande d’autorisation d’urbanisme.

 

 

Un cadre incitatif au-delà de la réglementation

 

Engagement national pour enrayer le déclin de la biodiversité

 

La 3e Stratégie Nationale pour la Biodiversité fixe des objectifs à atteindre pour la France en 2030 afin de préserver les milieux naturels et les espèces. La mesure n° 16 de cette stratégie vise spécifiquement la mise en place d’actions dans le secteur de la construction comme favoriser la végétalisation des bâtiments ou former les entreprises du secteur aux enjeux biodiversité.

 

Par ailleurs, il est recommandé d’appliquer pour tous les chantiers la logique « Eviter, réduire, compenser » inscrite dans le Code de l’environnement (article L-122), même si les projets ne sont pas à évaluation environnementale. Cette séquence hiérarchisée ERC invite dans un premier temps, à privilégier l’évitement d’un éventuel impact négatif sur l’environnement, le cas échéant, de le réduire le plus possible, et en dernier recours, de le compenser.

 

Charte environnementale de chantier

 

Certains chantiers peuvent être soumis à une charte environnementale, appelée aussi charte « chantier vert » ou charte « chantier propre ». Il s’agit d’un document contractuel inclus dans les CTTP dont le contenu dépend du maître d’ouvrage.

 

Cette charte environnementale concerne tous les acteurs qui interviennent sur le chantier, y compris les sous-traitants, qu’il s’agisse d’un projet de construction neuve, de rénovation ou de démolition.

 

Elle engage le maître d’ouvrage à prendre en compte dans le cahier des charges du projet l’environnement immédiat dans toutes ses dimensions : limitation des nuisances auprès des riverains et du personnel qui travaille sur le chantier, et préservation du milieu naturel et de la biodiversité.

 

Tout signataire de la charte environnementale doit respecter des engagements concrets ciblant trois thématiques :

  • les flux entrants du chantier (choix des engins et matériels) ;
  • le chantier lui-même (techniques de construction, gestion des déchets) ;
  • les flux sortants du chantier (évacuation des déchets, nuisances…).

 

Quelques exemples de chartes environnementales : Charte chantier vert, Chantier propre, Construire propre, etc.

 

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