Réemploi des matériaux et produits de construction dans le bâtiment

Le réemploi dans le bâtiment contribue à la préservation des ressources naturelles tout en diminuant le volume des déchets du secteur. C’est aussi un moyen de contribuer aux objectifs de décarbonation. Si les projets incluant du réemploi se multiplient, il est important d’en connaître les enjeux et de prendre quelques précautions. La FFB vous donne les principales clés : différence entre réemploi et réutilisation, responsabilité de l’entrepreneur, fournisseurs de matériaux de réemploi et recommandations pratiques (chiffrage, assurance, TVA, etc.).
15:0111/01/2024
Rédigé par FFB Nationale

Pourquoi faire du réemploi dans le bâtiment ?

 

Le secteur du bâtiment représente environ 19 % de la production de déchets du BTP, soit 46 millions de tonnes par an. Le réemploi permet de diminuer le volume de ces déchets, en particulier ceux alimentés par les activités de réhabilitation et déconstruction.

 

L’État ambitionne une approche pleinement circulaire en faisant du parc des bâtiments la banque de matériaux des constructions futures.

 

La loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (loi AGEC) acte quatre dispositions visant à développer le réemploi dans le bâtiment :

  1. Une filière responsabilité élargie du producteur pour les déchets du bâtiment (REP PMCB) dont le cahier des charges des éco-organismes prévoit d’atteindre 4% de matériaux réemployés en 2027 et 5% en 2028 ;
  2. Un diagnostic déchets avant démolition et réhabilitation plus ambitieux et intégrant la dimension réemploi (diagnostic PEMD) ;
  3. La mise en place d’objectifs de réemploi dans les achats des collectivités
  4. La sortie du statut de déchets pour les matériaux à destination du réemploi

 

La RE 2020 encourage l’utilisation de matériaux et produits de réemploi ou de réutilisation dans les bâtiments neufs. L’impact carbone de ces produits étant considéré comme nul dans le calcul ACV du bâtiment (analyse de cycle de vie), leur utilisation contribue à l’atteinte des seuils imposés par cette règlementation.

 

Quelle différence entre réemploi, réutilisation et recyclage ?

 

Souvent, l’amalgame est fait entre réemploi, réutilisation et recyclage. Or, ces termes répondent à des définitions bien précises et ne couvrent pas les mêmes activités.

 

Le Code de l’environnement (art. L541-1-1) définit quatre notions différentes :

 

  • Réemploi : toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus. Par exemple : une cloison mobile est démontée, reconditionnée et réemployée dans sa même fonction dans le même ouvrage rénové ou dans un autre ouvrage.

 

  • Réutilisation : toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui sont devenus des déchets sont utilisés de nouveau. Par exemple : la cloison mobile est réutilisée comme mobilier (changement de fonction).

 

A noter que dans la pratique, les termes réemploi et réutilisation sont souvent utilisés sans distinction pour faire référence à ces deux pratiques. La France est d’ailleurs le seul pays qui distingue les deux, en anglais le terme « to reuse » recouvrant à la fois les notions de réemploi et réutilisation.

 

  • Recyclage : toute opération de valorisation par laquelle les déchets, y compris les déchets organiques, sont retraités en substances, matières ou produits aux fins de leur fonction initiale ou à d'autres fins. Par exemple : la cloison mobile en bois est broyée et traitée et la matière réutilisée dans la fabrication d’un autre composant.

 

  • Déchet : toute substance ou tout objet, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire.

 

 

De l’intérêt du réemploi pour les entreprises de travaux

 

Aujourd’hui, le réemploi en France concerne moins de 1% du gisement des déchets du bâtiment (estimation ADEME 2021).

 

Néanmoins les projets incluant des prescriptions de réemploi se multiplient sous l’impulsion de maîtres d’ouvrage désireux de construire de manière plus vertueuse (baisse de l’empreinte carbone des constructions, préservation des ressources, diminution des déchets, etc.). De nombreuses questions se posent pour les entreprises qui doivent répondre à ces marchés.

 

La FFB a constaté que les entrepreneurs perçoivent positivement le développement du réemploi dans leurs activités. Dans certains métiers, le réemploi ponctuel est déjà une pratique courante, maîtrisée et historique (taille de pierre, charpente, couverture, etc.).

 

Face aux problèmes des déchets et des surplus inutilisés, les artisans et entrepreneurs du bâtiment affirment leur réticence à jeter des matériaux réemployables. Ils voudraient pouvoir s’engager dans les activités liées au réemploi d’abord sur les chantiers mais aussi, pour certains, dans les activités amont à l’introduction des produits et équipements de réemploi dans l’ouvrage.

 

Beaucoup s’interrogent sur la façon dont les marchés du réemploi pourront se développer tant ils ressentent que les contraintes actuelles sont fortes : gisement hétérogène et dispersé, caractérisation des produits et matériaux, responsabilité juridique des acteurs, etc. qui font que le modèle économique n’est pas encore trouvé. Les artisans et entrepreneurs ont aujourd’hui besoin de visibilité.

 

Ma responsabilité en tant qu’entrepreneur est-elle modifiée si j’utilise des matériaux de réemploi ? 

Que les matériaux soient neufs ou issus du réemploi, qu’ils soient fournis par le maître d’ouvrage ou par l’entreprise, les règles en matière de responsabilité des constructeurs restent inchangées. Si un ouvrage est créé, l’entreprise sera redevable des garanties légales des constructeurs : garantie de parfait achèvement, de bon fonctionnement et garantie décennale.

 

 

Où trouver des matériaux de construction de réemploi ?

 

Le site OPALIS regroupe l’ensemble des fournisseurs de matériaux de réemploi en France, en Belgique, au Luxembourg et aux Pays-Bas : opalis.eu/fr/fournisseurs

 

Les entreprises peuvent aussi demander à votre fournisseur s’il récupère ses produits et matériaux issus d’opérations de travaux pour les remettre à disposition sur le marché en tant que matériaux réemployés.

 

Par ailleurs, de très nombreuses plateformes numériques à portée nationale ou locale vous permettent également de disposer en ligne d’un choix de matériaux de réemploi ou de surplus de chantier.

 

Exemples de plateformes existantes (liste non exhaustive, fournie à titre indicatif et sans caractère commercial) :

  • Cycle up
  • Stock Pro
  • Backacia
  • BatRécup
  • Baticycle
  • Batirécup (Bretagne)
  • Mineka (AURA)
  • Articonnex (Pays de la Loire)
  • Möbius (dalles de faux plancher)
  • Sinfina (matériaux métalliques)
  • Proclus (équipements électriques techniques)
  • Maison Carelle (carrelages)
  • ...

 

 

Actions FFB pour le réemploi des matériaux de construction

 

Le bâtiment de demain pourra se concevoir et se rénover avec des matériaux de réemploi uniquement si les conditions de faisabilité techniques, économiques et juridiques nécessaires sont réunies.

 

Faciliter l’avènement du réemploi implique de la part des acteurs de la filière bâtiment de se former davantage à l’écoconception et aux techniques résilientes. Mais attention à effectuer les bons choix !

 

Après avoir réalisé un important travail de retour d’expérience auprès de ses adhérents, la FFB a formulé tant auprès des pouvoirs publics que des acteurs de la chaine de construire les quatre demandes suivantes.

 

1. Disposer de matériaux de réemploi caractérisés pour les chantiers

Les professionnels du bâtiment doivent avoir pleine confiance dans les matériaux de réemploi utilisés sans se poser la question de l’acceptabilité d’aspect, de la qualité technique ou encore de la durabilité des produits.

 

2. Créer des conditions juridiques et assurantielles favorables au réemploi

La FFB travaille avec les acteurs de la filière pour que le réemploi puisse être intégré dans le domaine de la technique courante au sens des contrats d’assurance. Dans cet objectif, elle participe à plusieurs démarches notamment avec le CSTB et l’Agence Qualité construction.

 

3. Créer un cadre économique équilibré et incitatif au réemploi

L'Etat, avec les collectivités territoriales, est le mieux placé pour promouvoir le réemploi. Néanmoins pour assurer la réussite d’un projet, les objectifs fixés et les prescriptions demandées doivent être cohérents avec le contexte local et les ressources disponibles et incitatifs.

 

4. Favoriser le réemploi en circuit court

Plutôt que de se lancer dans une industrialisation à outrance consommatrice d’espaces et de ressources, néfaste pour l’empreinte carbone, générant des pertes de compétences et pesant négativement sur la balance commerciale française, la préférence doit aller au choix de solutions techniques à échelle humaine, favorisant le démontage et la réparabilité, l’utilisation de matériaux locaux issus de l’écosystème territorial des entreprises artisanales et industrielles fonctionnant en circuits courts. 

 

 

Réemploi : recommandations pratiques pour les entreprises de travaux

 

Ces recommandations destinées aux entreprises de bâtiment sont issues de l’étude FFB « REX chantiers réemploi » de juin 2021.

 

Pour les réponses aux appels d’offres

 

Attention : en marché public, les marges de manœuvre sont plus réduites.

 

> Privilégier les projets pour lesquels le gisement de produits à réemployer est identifié au préalable.

 


> Si possible, demander à voir les produits avant de répondre à l’appel d’offres.

 

> Dans la mesure du possible, au vu des documents contractuels, proposer plusieurs chiffrages :
  • Un chiffrage dans le cas où le gisement est ou sera identifié par l’équipe de maîtrise d’œuvre et où les produits de réemploi seront fournis à l’entreprise ;
  • Un chiffrage d’approvisionnement, lorsqu’il existe, via un fournisseur « industriel » de matériaux de réemploi ;
  • Un chiffrage « plan B » avec fourniture de matériaux neufs.

 

> Pour le chiffrage des travaux :

  • Vérifier/clarifier les tâches et travaux qui incombent à l’entreprise ;
  • Ne pas sous-estimer le temps et la main d’œuvre nécessaires ;
  • Mettre en valeur son expertise et ses savoir-faire recherchés.
 

Concernant les aspects juridiques et assurantiels

 

> Maîtriser le process de réemploi (déconstruction, transport, qualification...)

 

> Clarifier les rôles et responsabilités de chacun des acteurs impliqués dans le projet.

 

> Constituer une base d’information sur les matériaux à réemployer sur le chantier :

  • Se renseigner sur les process subis par les matériaux depuis leur dépose jusqu’à leur livraison à l’entreprise ;
  • Demander au maître d’ouvrage ou à son représentant un dossier technique ou tout autre élément permettant de caractériser le produit de réemploi (vie en œuvre précédente, photos, résultats d’essais potentiels, etc.).

 

> Tenir compte des risques possibles selon le matériau et son usage.

  • Interroger son assureur en amont : une discussion est indispensable afin de valider les conditions d’assurabilité pour chacun des acteurs (maître d’ouvrage, entreprise…)

 

Réemploi : les réponses aux questions que vous vous posez

 

Quel est le taux de TVA appliqué à la vente des matériaux de réemploi ?

Le taux de TVA qui s’applique est le taux normal actuellement fixé à 20% que nous soyons en présence de matériaux d’occasion ou de récupération. S’agissant de la revente de matériaux de récupération, des règles spécifiques peuvent s’appliquer. En effet, Les assujettis-revendeurs sont passibles de la TVA au taux normal de 20%. Mais (et c'est la spécificité de leur régime particulier) cette TVA s'applique seulement, en principe, sur la marge, c'est-à-dire sur la différence entre le prix de vente et le prix d'achat. Pour leurs opérations autres que celles relevant de ce régime particulier, les intéressés demeurent soumis aux règles de droit commun, c'est-à-dire à la taxation sur le prix de vente total. Cette taxation sur le prix de vente total intervient lorsque le bien vendu a ouvert droit à déduction lors de son acquisition par l'assujetti-revendeur.

 

Quel est taux de TVA applicable sur les chantiers ?

Sur un chantier, il est possible d’appliquer le taux normal ou le taux réduit (10 ou 5,5%) selon l’objectif de l’opération :

  • Taux réduit sur le social ou le logement achevé depuis plus de deux ans ;
  • Taux normal sur le reste.

 

Comment répondre à une entreprise qui doit respecter dans son marché public une clause de réemploi de matériaux ou d’équipement de construction ?

Cette question est du ressort du technique et plusieurs questions doivent être résolues : que prévoit le CCTP ? D’autres documents contractuels prévoient-ils des dispositions spécifiques ? Les demandes de l’acheteur public sont-elles réalistes ?

 

Comment répondre à une entreprise qui se voit imposer dans un marché privé un taux de matériaux de réemploi ?

Dans un marché privé, les entreprises peuvent négocier avec le client les dispositions non obligatoires et refuser les dispositions contraires à la réglementation.

 

Comment répondre à une entreprise qui se verrait imposer dans un marché public avec une collectivité territoriale des seuils de réemploi supérieurs à ceux que fixerait une règlementation ?

L’entreprise doit écrire à l’acheteur public sur son profil d’acheteur afin de lui demander la modification des documents contractuels. A ce jour, aucune règlementation n’impose un taux de réemploi à l'exception des achats publics relatifs au mobilier urbain, aux bâtiments préfabriqués et aux bâtiments modulaires préfabriqués qui impose un taux visant le réemploi ou la réutilisation (loi AGEC précitée).

 

Comment doivent répondre les entreprises qui se voient imposer le respect de chartes locales dans leurs marchés publics ?

Il convient d’abord de vérifier si l’observation de la charte est bien un élément contractuel du marché et non une simple information et ensuite de cerner la teneur des obligations qui s’adressent réellement à l’entreprise pour en vérifier la faisabilité.

 

Comment chiffrer son marché lorsqu’une clause impose un taux de matériaux de réemploi ?

Tout dépend de la portée de l’intervention de l’entreprise. L’entreprise doit chiffrer tous les postes de coûts relatifs à son intervention (par exemple : dépose, curage, contrôle, stockage, transport, etc.).

 

Contenu réservé aux adhérents FFB

  • Profitez aussi de conseils et de soutien

    Des services de qualité, de proximité, avec des experts du Bâtiment qui connaissent vos enjeux métier et vous accompagnent dans votre quotidien d'entrepreneur.

  • Intégrez un réseau de 50 000 entreprises

    La FFB est fière de représenter toutes les entreprises du bâtiment, les 2/3 de nos adhérent(e)s sont des entreprises artisanales.

  • Bénéficiez des dernières informations

    Recevez Bâtiment actualité 2 fois par mois pour anticiper et formez-vous aux évolutions des métiers ou de la législation.

Pour contacter facilement votre fédération et accéder aux prochaines réunions
Vous n'êtes pas adhérent et vous cherchez une information ?