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Intempéries : comment obtenir la prolongation des délais et l’indemnisation des dommages ?
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La prolongation est décidée par le maître d’ouvrage, sur proposition du maître d’œuvre, après consultation de l’entrepreneur. Elle est notifiée à l’entreprise par ordre de service qui en précise la durée.
En principe, le délai d’exécution est prolongé du nombre exact de journées au cours desquelles le travail a été arrêté du fait des intempéries, diminué, le cas échéant, des journées d’intempéries prévisibles prévues au cahier des clauses administratives particulières (CCAP).
Exemple : en cas d’intempéries empêchant l’exécution des travaux, le représentant de l’entreprise décide de suspendre les travaux pendant 17 jours. Or, le CCAP prévoyait 10 journées d’intempéries prévisibles. Dans ce cas, seules 7 journées d’intempéries seront prises en compte dans le calcul de la prolongation du délai d’exécution. Remarque Les samedis, dimanches et jours fériés ou chômés compris dans la période d'intempéries sont ajoutés pour le calcul de la prolongation du délai d'exécution.
Prolongation spécifique prévue par les documents du marché
Indépendamment des dispositions du Code du travail, le marché peut prévoir la prise en compte d'intempéries ou d'autres phénomènes naturels en fonction de critères prédéfinis dans les documents du marché.
Dans ce cas, le contrat doit fixer les conditions et modalités de prolongation : définition des intempéries, intensités limites pouvant donner droit à prolongation, station météo de référence, etc.
Ainsi, dès lors que les critères définis au contrat sont remplis, l’entreprise a droit à une prolongation de ses délais d’exécution. Là aussi, le contrat peut prévoir de limiter le nombre de journées pouvant ouvrir droit à prolongation des délais.
Exemple : le CCAP prévoit une prolongation des délais dès lors que la neige dépasse une intensité limite de 7 cm. Il prévoit également que, dans ces conditions, seuls 10 jours pourront donner droit à prolongation des délais.
Dans ce cas, si l’intensité limite est atteinte pendant 17 jours, seuls 10 jours pourront ouvrir droit à prolongation des délais. L’entreprise doit donc porter une attention particulière aux éventuelles clauses « intempéries » du marché.
À noter : après la fin des intempéries, le chantier peut demeurer impraticable. Il convient alors de faire constater par le maître d’œuvre l’impossibilité de reprendre l’exécution des travaux et de demander une nouvelle prolongation du délai d’exécution.
De la même manière, lorsque l’entreprise est appelée d’urgence, dans le cadre d’un ordre de réquisition (par exemple, pour réparer les dégâts causés par la neige sur un autre chantier) et qu’elle ne peut par conséquent intervenir sur ses chantiers en cours, elle doit prévenir le maître d’œuvre et lui demander une prolongation des délais, par lettre recommandée avec AR.
Cette prolongation est expressément prévue par l’article 18.4 du CCAG-Travaux 2021 : « Lorsque l’entrepreneur est amené à intervenir dans le cadre d’un ordre de réquisition, le délai d’exécution du marché en cours est prolongé de la durée d’intervention nécessitée par cette situation d’urgence. »
Vigilance sur la procédure
L’entreprise doit être vigilante quant à la procédure à mettre en place pour bénéficier de la prolongation en cas d’intempéries.
Le juge considère que pour obtenir une prolongation du délai d’exécution, le titulaire du marché doit demander en temps utile la constatation des intempéries ou autres phénomènes naturels allégués 7. Ainsi, dès que l’entreprise est confrontée à des difficultés d’exécution liées à des intempéries, elle doit avertir le maître d’œuvre (avec copie au maître d’ouvrage) et solliciter la constatation contradictoire des difficultés rencontrées pour que le maître d’œuvre lui notifie la prolongation des délais d’exécution par ordre de service.
En marchés privés soumis à la norme NF P 03 001 8
L’article 10.3.1.1.1 de la norme NF P 03 001 indique que les journées d’intempéries sont :
- celles où le travail est arrêté, conformément aux dispositions de l’article L. 5424-8 du Code du travail. La norme renvoie ici à la définition légale des intempéries 9 ;
- celles pour lesquelles une impossibilité technique découlant des intempéries a été constatée par le maître d´œuvre, et notamment dans le cas où les conditions d´accès ou le respect des règles élémentaires de sécurité ne peuvent être normalement assurés.
Les parties sont libres de prévoir dans leur marché des clauses particulières sur les intempéries avec :
- une définition spécifique des intempéries pouvant donner lieu à indemnisation ;
- des modalités de prolongation de délai spécifiques.
Exemples
Le CCAP peut prévoir :
- que seules certaines journées d’intempéries seront prises en compte pour prolonger le délai d’exécution ;
- un forfait de journées d’intempéries prévisibles, qui ne pourront donner lieu à prolongation des délais ;
- que les prolongations ne seront admises qu’en cas de dépassement d’intensités limites.
À titre d’illustration, le juge judiciaire a admis la validité d’une clause définissant les intempéries à prendre en compte comme celles prévues par les états de la chambre syndicale des entrepreneurs de la construction ou, à défaut, par les relevés de la station météorologique la plus proche 10.
La demande de prolongation doit être adressée dans les plus brefs délais au maître d’ouvrage par LRAR, avec copie au maître d’œuvre.
En marchés privés non soumis à la norme NF P 03 001
Si le marché ne fait pas référence à la norme NF P 03 001, il faut, avant de le signer, s’assurer qu’il comporte des clauses encadrant la prise en compte des intempéries et, dans la négative, tenter de négocier l’insertion de telles clauses avant la signature du contrat.
Si, toutefois, le marché signé ne comprend pas de clause « intempéries », l’entreprise confrontée à des intempéries en cours d’exécution peut invoquer la force majeure pour demander une prolongation du délai d’exécution.
Quand invoquer la force majeure ?
Il y a force majeure lorsqu’un évènement échappant au contrôle de l’entreprise, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution du contrat 11.
Les conditions climatiques ne revêtent le caractère de la force majeure qu’à la condition qu’elles aient un caractère exceptionnel et qu’elles empêchent effectivement la réalisation des travaux.
Par ailleurs, dès la survenance du cas d’intempérie, l’entreprise doit, sans tarder, demander la prolongation des délais d’exécution au maître d’ouvrage, avec copie au maître d’œuvre, de préférence par LRAR.
Indemnisation de l’entreprise
En marchés publics
L’indemnisation est possible dans deux cas :
- pertes, avaries ou dommages sur chantier ;
- intempéries pouvant être qualifiées de sujétions techniques imprévues.
Indemnisation des pertes, avaries ou dommages sur chantier
Cette possibilité d’indemnisation est prévue par le CCAG-Travaux, qui indique qu’en cas de pertes, avarie, ou dommages provoqués sur ses chantiers par un phénomène naturel qui n'était pas normalement prévisible, ou en cas de force majeure, le titulaire est indemnisé pour le préjudice subi, à condition :
- d’avoir pris, en cas de phénomène naturel, toutes les dispositions découlant de l'article 17.2 12 ;
- d’avoir signalé immédiatement les faits par écrit au maître d'ouvrage 13.
L’entreprise devra présenter sa demande d’indemnisation chiffrée et assortie de toutes les justifications nécessaires au maître d’ouvrage, avec copie au maître d’œuvre.
Indemnisation en cas de sujétions techniques imprévues
Les sujétions imprévues sont des difficultés matérielles anormales et exceptionnelles rencontrées par une entreprise et qui n'étaient pas raisonnablement prévisibles lors de la conclusion du marché.
Les juridictions administratives vérifient le caractère exceptionnel des intempéries en raison des circonstances de temps et de lieu.
En marchés privés
La norme NF P 03 001 ne permet pas l’indemnisation des pertes, avaries ou dommages en cas d’intempéries : « 9.1.4 L'entrepreneur n'a droit à aucune indemnité de la part du maître de l’ouvrage pour pertes, avaries ou dommages occasionnés par sa négligence, son imprévoyance ou ses fausses manœuvres, pas plus que pour ceux occasionnés par le fait de tiers ou de phénomènes naturels. »
L’entreprise est responsable de ses ouvrages, approvisionnements, matériaux et matériels de chantier jusqu’à la réception des travaux.
En conséquence, et sauf clause contraire du marché, l’entreprise doit supporter, avant la réception des travaux, les frais nécessités par la réparation des dommages subis et doit assumer les risques sur les matériaux approvisionnés et la réparation éventuelle de son matériel.
Ainsi, en marchés privés, l’entreprise ne pourra bénéficier que d’une prolongation des délais, sauf accord du maître d’ouvrage.
- Cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux (arrêté du 30 mars 2021). Il n’est applicable que s’il est cité comme document contractuel.
- Article 18.2.3 du CCAG-Travaux 2021.
- Articles L. 5424-6, L. 5424-8 à 15 et L. 5424-18 du Code du travail.
- Article L. 5424-9 du Code du travail.
- L’obligation de mettre en place un comité social et économique ne s’impose que pour les entreprises d’au moins 11 salariés (article L. 2311-2 du Code du travail).
- Article 18.2.3 alinéa 1.
- Conseil d’État, 13 oct. 2004, n° 248319, Sté générale des Entreprises Quillery Bâtiment
- Norme Afnor NF P 03 001 Marchés privés - Cahier types - Cahier des clauses administratives générales applicable aux travaux de bâtiment faisant l’objet de marchés privés (édition octobre 2017). Ce document n’est applicable que s’il est cité comme document contractuel.
- Cf. dans l’article la partie « Prolongation en cas d’intempéries entraînant un arrêt de travail sur le chantier ».
- Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 5 février 2019 - n° 17/05 124 ; voir également Cour de cassation, 3e chambre civile, 7 avril 2009, n° 08-14.096.
- Article 1218 du Code civil.
- Article 17.2 du CCAG-Travaux 2021 : « Le titulaire doit prendre à ses frais, risques et périls les dispositions nécessaires pour que les approvisionnements et les matériels et installations de chantier ainsi que les ouvrages en construction ne puissent être enlevés ou endommagés par les tempêtes, les crues, la houle et tous autres phénomènes naturels qui sont normalement prévisibles dans les conditions de temps et de lieu où s’exécutent les travaux. »
- Article 17.3 du CCAG-Travaux 2021.
En pratique
- 13:2512/01/2023
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