Paiement des situations : vous êtes en droit de l'exiger à 100 % !

Certains maîtres d'ouvrage et comptables publics demandent aux entreprises d'établir une dernière situation à 90, 9 %... du montant des travaux, refusant une dernière situation à 100 %, sous le prétexte que la réception des travaux n'est pas prononcée. De plus, de nombreux maîtres d'ouvrage prévoient des clauses dans le CCAP 1 leur permettant de garder 2, 3 ou 5 % des sommes dues au titre de la retenue de bonne fin de travaux, la retenue pour la non-fourniture des dossiers des ouvrages exécutés (DOE), la retenue pour les réserves émises lors du parfait achèvement... Comment réagir face à ces pratiques abusives ? Explications.
11:0008/06/2016
Rédigé par FFB Nationale
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Batiment Actualité Numéro 10 | Juin 2016

Marchés publics

Le CCAG-Travaux de 2009 2 organise la procédure de paiement des situations mensuelles. Il indique qu'avant la fin de chaque mois le titulaire remet sa demande de paiement mensuelle au maître d'œuvre, sous la forme d'un projet de décompte 3.

Le maître de l'ouvrage public est en droit de retenir 5 % du montant du marché si une disposition contractuelle prévoit une retenue de garantie 4.

Cependant, certains maîtres d'ouvrage publics prévoient des clauses dans le cahier des clauses administratives particulières (CCAP) leur permettant de garder 2, 3 ou 5 % des sommes dues au titre de retenues diverses : retenue de bonne fin de travaux, retenue pour la non-fourniture des dossiers des ouvrages exécutés (DOE), etc.

Trois cas de figure peuvent se présenter.

 

Diverses retenues sont prévues contractuellement

Le marché peut prévoir des retenues en plus de la retenue de garantie, dès lors qu'elles n'ont pas pour effet d'augmenter le montant de la retenue de la garantie (5 % maximum du montant TTC des travaux) ou d'étendre son objet (réserves émises à la réception et lors du parfait achèvement).

Exemples

Une garantie de bonne fin, prévue contractuellement, est régulière si elle est libérée à la date de la réception des travaux. À défaut, le montant des 5 % de retenue de garantie prévus par l'article 122 du décret du 25 mars 2016 serait dépassé.
Mais une garantie pour des réserves de parfait achèvement ne peut être prévue, car ces réserves sont déjà englobées dans l'objet de la retenue de garantie en marché public.

En conséquence, le paiement des sommes dues à l'entrepreneur est de 95 % au jour de la réception des travaux, les 5 % restants (correspondant à la retenue de garantie) étant libérés un an après la date d'effet de la réception des travaux.

 

Seule la retenue de garantie est prévue contractuellement

Dans ce cas, l'entrepreneur peut exiger le paiement des sommes dues à 95 % dans les situations mensuelles.

Mais en fin de marché, le paiement est parfois bloqué par le maître d'œuvre ou le maître de l'ouvrage à un certain pourcentage (2, 3 %…) - sans aucun fondement juridique - en plus de la retenue de garantie.

Un entrepreneur peut, dans cette hypothèse, exiger le paiement de la totalité des sommes qui lui sont dues lors de la production de la dernière situation mensuelle : le décret précité et l'article 13.1.1 du CCAG-Travaux 2009 n'interdisent pas à un maître d'ouvrage public de régler par acomptes successifs la totalité ou la quasi-totalité du montant d'un marché au fur et à mesure de son exécution.

Dans ces deux premiers cas, si l'entrepreneur a remplacé la retenue de garantie par une caution personnelle et solidaire 5 (si l'acheteur ne s'y oppose pas), ou par une garantie à première demande, le refus de payer les entreprises à 100 % est contraire à l'article 114 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, qui dispose que « le montant des acomptes correspond à la valeur des prestations auxquelles ils se rapportent ».
De même, le comptable public n'est pas fondé à suspendre le paiement du dernier acompte périodique et le solde peut être égal à zéro euro.

Aucune retenue n'est prévue contractuellement

Pour trouver application, la retenue de garantie doit être prévue contractuellement 5 : il se peut que pour les marchés passés selon une procédure adaptée, le devis de l'entrepreneur ou des documents succincts du maître de l'ouvrage public ne prévoient ni retenue de garantie, ni garantie de bonne fin, ni retenue pour la non-fourniture des dossiers des ouvrages exécutés (DOE) ou de tout autre document.

Dans ce cas, l'entrepreneur est en droit d'exiger le paiement de la totalité des sommes dues.

L'attitude du maître d'ouvrage public refusant le paiement à 100 % est critiquable, puisqu'elle ne permet pas une application satisfaisante du contrat.

La FFB est intervenue à plusieurs reprises auprès de maîtres d'ouvrage contre la multiplication des retenues.

Marchés privés

Diverses retenues sont prévues contractuellement

Des dispositions contractuelles prévoyant des retenues diverses peuvent cohabiter avec une retenue de garantie.

Mais elles ne doivent pas avoir pour effet d'augmenter le montant de la retenue de garantie (5 % maximum du montant TTC des travaux) ou d'étendre son objet (les réserves à la réception).

Elles ne sont pas contraires à la loi n° 71-584 du 16 juillet 1971 relative à la retenue de garantie d'ordre public 6.

Exemple

La garantie de bonne fin n'est régie par aucun texte en droit français : le seul élément à avancer par l'entreprise, dans ce cas, est qu'elle doit être libérée à la date de la réception des travaux.
Dans le cas contraire, le montant des 5 % de retenue de garantie prévus par la loi serait dépassé.
En conséquence, le paiement des sommes dues à l'entrepreneur doit être de 95 % au jour de la réception des travaux, les 5 % restants (correspondant à la retenue de garantie) étant libérés un an après la date d'effet de la réception des travaux.

Seule la retenue de garantie est prévue contractuellement

Dans ce cas, l'entrepreneur peut exiger le paiement des sommes dues à 95 %.

Il arrive cependant qu'en fin de marché le paiement soit bloqué par le maître d'œuvre ou le maître de l'ouvrage à un certain pourcentage — sans aucun fondement juridique — en plus de la retenue de garantie.

L'entrepreneur pourra leur opposer l'article 111-3-1 du Code de la construction et de l'habitation (CCH). Celui-ci prévoit que « les prestations qui ont donné lieu à un commencement d'exécution des marchés privés 7 ouvrent droit à des acomptes ». Ainsi, tous les travaux exécutés doivent être payés.

Dans ces deux premiers cas, si l'entreprise a fourni une caution personnelle et solidaire en remplacement de la retenue de garantie, elle a droit au paiement total des sommes dues à la réception des travaux.

Aucune retenue n'est prévue contractuellement

L'entrepreneur est en droit d'exiger le paiement de la totalité des sommes dues en faisant valoir son contrat et l'article L. 111-3-1 du CCH précité :

  • si aucune disposition contractuelle ne prévoit de retenue pour une quelconque garantie de bonne fin, pour la non-fourniture des dossiers des ouvrages exécutés (DOE) ou de tout autre document ;
  • et si aucune retenue de garantie n'est prévue.
  1. Cahier des clauses administratives particulières.
  2. Cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ; arrêté du 8 septembre 2009 modifié.
  3. Article 13.1.1 du CCAG-Travaux de 2009.
  4. Article 122 du décret n° 2106-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics.
  5. Article 123 dernier alinéa du décret n° 2106-360 du 25 mars 2016.
  6. Cf. Bâtiment actualité n° 10 du 3 juin 2014.
  7. « Mentionnés au 3° de l'article 1779 du Code civil ».
  8. Les entreprises doivent produire ces textes auprès des maîtres d'œuvre, maîtres d'ouvrage et trésoreries qui refuseraient de respecter la réglementation. Dans un contexte économique difficile, le paiement des acomptes à 100 %, lorsque la retenue de garantie est cautionnée, est une nécessité pour les entreprises.

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