Divers rapports se sont succédé sur cette question, parmi lesquels celui publié en 2016 par plusieurs organisations, dont la FFB, et intitulé « Mission de réflexion sur la normalisation appliquée au secteur du bâtiment » et, plus proche de nous, celui d’Yves Laffoucrière et Ludovic Scarpari sur la simplification des réglementations dans la construction, rendu public à l’été 2019.
Vue de l’extérieur, la normalisation peut, en effet, s’apparenter à un labyrinthe. Plusieurs raisons à cela. Les normes sont élaborées dans un cadre purement privé, par une communauté d’experts, sous l’égide d’organismes au niveau national (l’Afnor en France), européen et international. Or, il est souvent difficile structurellement pour les entreprises de pouvoir s’impliquer dans l’ensemble des organes de normalisation (commissions, comités ou groupes de travail). De fait, il en résulte un manque de professionnels dans le fonctionnement du système de normalisation.
Ensuite, ces normes sont d’application purement volontaire ; elles ne deviennent un engagement contractuel qu’une fois citées dans le contrat. Sur les quelque 4 000 normes en vigueur dans le secteur du bâtiment, moins d’une centaine est d’application obligatoire. Mais les professionnels n’en sont pas toujours informés, d’autant que la confusion est alimentée par le fait que des normes peuvent être référencées dans la réglementation. Et pour ne rien arranger, les normes citées dans les lois, décrets ou arrêtés ont une portée juridique variable : elles peuvent être simplement indicatives ou revêtir un caractère obligatoire, ou bien conférer une présomption de conformité à la réglementation.
En pratique, les normes s’imposent comme des carcans quasi obligatoires, voire des instruments de contrôle souvent à charge, à l’opposé de leur vocation qui est d’offrir une fonction de ressources, au bénéfice des professionnels s’ils en expriment le besoin. Dernier élément, le coût d’achat des normes constitue un frein à leur appropriation, en particulier pour les petites structures. Face à ce constat en demi-teinte, la FFB a estimé nécessaire de mener fin 2019 une campagne de sensibilisation auprès de ses adhérents pour rappeler le fonctionnement de la normalisation, son bon usage et ses enjeux pluriels. Qu’on se le dise, la normalisation est une activité stratégique qu’il convient d’investir pleinement.
La prise de conscience des potentialités que recèle la norme est réelle, comme l’atteste l’étude que le Bureau de normalisation des techniques et équipements de la construction du bâtiment (BNTEC) a confiée en 2016 à l’Ifop pour mieux comprendre comment les entreprises perçoivent et utilisent les NF DTU. Il en ressort notamment que les entreprises reconnaissent les bénéfices des NF DTU sur le plan juridique et technique, pour concevoir et réaliser des ouvrages de qualité. Mais la normalisation recouvre bien d’autres enjeux. Ainsi, l’existence de normes permet d’ouvrir aux entreprises l’accès à de nouveaux marchés, y compris européens, en établissant des règles du jeu claires et équitables pour toutes les entreprises concernées. Un autre avantage de la normalisation est d’assurer une puis-sante diffusion du progrès technique issu des meilleurs états de l’art et une recon-naissance de l’entreprise qui y recourt. Sans oublier que la normalisation institue également des standards de qualité et de sécurité qui pourront, le cas échéant, être attestés par le biais d’une certification. Dans sa dimension contractuelle, la norme constitue un outil bien utile pour réduire les sinistres et délimiter les responsabilités de chaque intervenant sur une opération.
Enfin, la normalisation peut contribuer à la simplification de la réglementation, la norme volontaire venant à l’appui de la réglementation pour proposer un ou plusieurs moyens techniques, reconnus par les pairs comme les mieux à même d’atteindre les objectifs d’une loi ou d’un décret. Norme et réglementation sont ainsi complémentaires l’une de l’autre. Cette démarche est actuellement à l’œuvre avec la réécriture en cours du Code de la construction et de l’habitation. On le voit, les entreprises ont tout intérêt à tirer le meilleur parti de la normalisation. La FFB est à leur côté pour les aider à la connaître, la maîtriser et la mettre à profit.